Le cinéma hongkongais existe toujours

Organisé par une association culturelle hongkongaise, le FFHKP en est à sa troisième édition. Il s’est déroulé sur cinq jours, du 14 au 19 novembre, et a proposé sept films dont six récents diffusés pour la première fois en France, un documentaire et deux cours métrages. Comme l’année précédente, le festival a eu la bonne idée de se dérouler à l’Épée de bois, situé rue Mouffetard, c’est à dire à dix-quinze minutes à pied de mon parking parisien habituel. Il s’agit d’un petit cinéma de quartier classé Art et d’Essai composé de deux petites salles de moins de 100 places. L’écran est un peu petit mais l’espace entre deux rangées de siège est assez important, ce qui évite de s’ankyloser trop vite. La séance d’ouverture avait fait le plein, celles du week-end permettaient par contre de trouver quelques places au commencement de la projection. Manifestement, le festival a réussit à trouver son public (un peu de tous les âges et moins asiatique que je ne l’aurai pensé), la petitesse de la salle 1 permettant d’avoir plus facilement cette impression.

Avec ses petit·e·s camarades mangaversien·ne·s (a-yin, mais aussi Pierre et Tanuki à deux occasions) votre serviteur a vu quatre des sept films proposés dont deux se sont révélés réellement excellents, dans deux registres différents, l’un étant comique, l’autre dramatique. Voici donc, à l’instar du programme Portrait de Hong Kong qui s’est déroulé entre les mois d’avril et juin, un petit compte rendu de mes séances « d’images qui bougent » hongkongaises, cette fois automnales.

Where the Wind Blows

de Philip Yung (2022 — 2h24′)

J’étais là pour voir Tony Leung et j’ai été bien déçu tant la place du personnage principal a surtout été prise par Aaron Kwok. Surtout, le film a proposé une narration confuse, sautant d’une époque (de 1940 à 1970) à l’autre par bons de 10 ans, avec régulièrement des analepses, sans que ça soit toujours très clair. J’avais tendance à mélanger les personnages dans leur jeunesse (malgré des jeunes acteurs ressemblants, il faut le reconnaître). La reconstitution de la ville lors des trente décennies couvertes par l’histoire était impressionnante, on voyait que le film avait bénéficié d’un gros budget (il s’agit d’une coproduction entre la chine continentale et l’île). De plus, il y avait pas mal de longueurs à certain moments, des passages esthétisants qui n’apportaient rien au récit, et je ne parle pas des parties dansées qui tombaient régulièrement comme des cheveux sur la soupe. Bref, c’était souvent long, très long à regarder. La seule chose à retenir est que la police de Hong Kong a été vraiment corrompue pendant de nombreuses années, tout comme une grande partie de la colonie britannique, qu’elle soit l’origine de sa population : chinoise, indienne ou anglaise.

Over My Dead Body

de Ho Cheuk-Tin (2023 — 1h59′)

Dans ma toute nouvelle culture cinématographique hongkongaise, il me manquait un film comique. C’est donc chose faite. La première partie est tout simplement hilarante tant les mimiques des actrices et acteurs sont réussies, la seconde est parfois un peu longuette. En plus, et je ne l’avais pas prévu, il y a Jennifer Yu parmi les rôles principaux, même si on ne la voit plus trop à un certain moment. Dans sa première moitié, le film nous propose donc en permanence des scènes délirantes qui s’insèrent impeccablement dans le récit. C’est du grand n’importe quoi, mais du n’importe quoi réussi. Il faut dire que les protagonistes ont toutes et tous des problèmes, parfois sérieux, ce qui les amène à avoir souvent un comportement excessif. Pourtant, au delà d’une sorte de grand-guignol qui part un peu dans tous les sens, tout s’explique à la fin. C’est vraiment brillant. De plus, le réalisateur n’oublie jamais de placer dans son film quelques remarques sur certains comportements ou sur les dérives actuelles de la société hongkongaise, à commencer par celles liées aux excès du marché de l’immobilier ou à la difficulté de vivre tranquillement dans une période de marasme économique.

Back Home

de Nate Ki (2023 — 1h42′)

Il s’agit là d’un film d’ambiance plus que d’épouvante (et encore moins d’horreur) avec un récit qui alterne le présent, le passé et le rêve (ou plutôt les cauchemars) dans un lieu où les fantômes semblent régner en maitre sur tout un étage d’un immeuble plutôt délabré. Il m’est difficile de dire si je l’ai apprécié tant je ne sais pas quoi en penser. Je pense que le manque de références culturelles joue pour beaucoup. Le temps n’est pas passé lentement, c’est plutôt bon signe. Quoi qu’il en soit, le quartier où se déroule l’histoire ne donne pas envie de vivre à Hong Kong tant il semble triste et en pleine déréliction. Je ne parle même pas des ambiances glauques à l’intérieur de l’immeuble… Difficile d’en parler, il vaut mieux le voir (et ne pas détester les fins très ouvertes).

In Broad Daylight

de Lawrence Kan (2023 — 1h46′)

Si je suis allé sur Paris un dimanche après-midi pour voir un film dramatique, c’était bien pour son actrice principale, Jennifer Yu. Cependant, le sujet, celui des maisons / foyers d’accueil pour personnes âgées en perte d’autonomie et pour handicapés mentaux, m’intéressait. Bien m’en a pris tant il s’agit du meilleur film du festival, et peut-être même de tous les films hongkongais que j’ai pu voir cette année. Il a même réussi à m’arracher une ou deux « larmichettes » à certains moments, alors que je suis plutôt du genre peu sensible. Il faut dire que de nombreuses situations sont très dures et d’autres assez poignantes. Heureusement, le réalisateur a su ne pas trop « tartiner » son récit de scènes mélodramatiques, celles-ci ne fonctionnant pas trop en général alors même que les actrices et acteurs jouent magnifiquement leur rôle, y compris dans leur handicap. Leur détresse, mais aussi leurs petites joies sont souvent touchantes. Il y a par ailleurs un autre discours dans le film qui montre la disparition du journalisme d’investigation, généralement lié au déclin de la presse écrite. Dernier point appréciable, le réalisateur montre sur la fin que les choses ne sont pas toutes bonnes ou mauvaises, que rien n’est simple et que les meilleures intentions du monde ne débouchent pas nécessairement sur un résultat positif, que l’on peut faire du mal en voulant faire ce qu’on pense être le bien.

Ce festival, peut-être un peu trop court et ramassé dans le temps, s’est révélé être une excellente surprise grâce à une programmation variée, intéressante et surtout actuelle. Si tous les films ne peuvent pas plaire, ils sont invariablement intéressants par ce qu’ils montrent du Hong Kong actuel. D’ailleurs, de notre point de vue d’Européen particulièrement favorisé et ethnocentré, les œuvres proposées par le FFHKP nous décrivent globalement une ville / région qui ne donne pas trop envie d’y vivre, même présentée à travers une comédie. Cependant, il ne faut pas oublier qu’il s’agit là d’une vue partielle, née d’une création artistique cherchant à porter un propos. Comme un peu partout dans le monde, la période actuelle est plutôt difficile à vivre, notamment à Hong Kong avec la mainmise politique et économique de la Chine continentale de plus en plus prégnante. C’est ce réalisme qui rend cette programmation si intéressante, qui donne envie de revenir l’année prochaine pour une quatrième édition.

Une vision du cinéma hongkongais : The Golden Path

Dans le cadre du cycle « Portrait de Hong Kong » proposé durant l’été 2024 par le Forum des images (auquel j’ai consacré un billet) une rencontre (disponible sur YouTube) avec le bédéiste Baptiste Pagani a permis à une partie des personnes présentes (dont votre serviteur) de découvrir un auteur et une œuvre : The Golden Path, ma vie de cascadeuse. La lecture de cette bande dessinée s’étant révélée excellente, voici une petite chronique qui va essayer de rendre honneur au travail de cet auteur fan de cinéma d’action hongkongais de la fin du vingtième siècle.

Fin des années 1980 : Jin Ha débarque du Continent à Hong-Kong en espérant faire une carrière d’actrice cascadeuse dans les films d’action hongkongais dont elle est si fan depuis tout le temps. Sortie diplômée « artiste martiale » d’une école réputée de kung-fu de la province du Henan et munie d’une recommandation à présenter au cousin d’une de ses professeures, la voilà perdue au milieu d’une grande ville, de plus parlant très mal le cantonais. Heureusement pour elle, ses qualités de combattante, son courage, son ardeur au travail (et un peu de chance) lui permettent de réaliser rapidement son rêve : elle travaille dans un des principaux studios de cinéma auprès de celui qu’elle admire depuis toute petite, Eagle Chan. Malheureusement pour elle, un rien peut faire basculer sa vie du rêve au cauchemar, surtout dans un monde aussi difficile que celui du cinéma hongkongais.

Baptiste Pagani, à travers le personnages de Jin Ha, nous montre une facette du cinéma hongkongais, celui que l’on appelle « moderne », c’est-à-dire celui qui succéda à « la nouvelle vague » en 1986 et qui s’acheva à la fin des années 1990, après la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine. La quantité primait souvent sur la qualité et les ambitions artistiques des réalisateurs étaient souvent limitées par les producteurs. Il fallait faire dans le spectaculaire, l’efficace et présenter au public un tableau immédiatement compréhensible et surtout divertissant. Nous retrouvons ce soucis de simplicité et d’efficacité dans la bande dessinée qui n’approfondit pas les relations entre les protagonistes, ni ne s’attarde sur la psychologie ou la vie de tous les jours de notre héroïne. Par exemple, le méchant est vraiment méchant mais on ne sait pas trop pourquoi. Cependant, cela permet de dramatiser le récit et d’expliquer la soumission de Jin Ha, soumission qui est peu compréhensible de nos jours surtout vu de nos yeux d’Occidentaux. The Golden Path fait par ailleurs penser au film Viva erotica de Derek Yee (1996) qui est à la fois une comédie, une métafiction, et même une parodie du cinéma hongkongais. Ce n’est pas le cas ici, mais le fonctionnement des studios de cinéma de Hong-Kong nous y est, ici aussi, présenté de façon sinon réaliste, tout au moins crédible et les références sont nombreuses pour celles et ceux qui sauront les voir.

Une bonne histoire ne suffit pas (même si c’est indispensable). Sa mise en forme, tant graphiquement que pour les dialogues, doit être au niveau. Dans le cas présent, il faut éventuellement faire abstraction d’un dessin influencé par les jeux vidéos japonais, par un graphisme non franco-belge mais plutôt manga et comics alternatifs, par l’univers visuel que l’on peut rencontrer dans le monde de l’animation (et pouvant rappelant l’École des Gobelins). Le tout donne un mélange auquel il faut s’habituer. Néanmoins, les amatrices et amateurs des œuvres de Guillaume Singelin (lui aussi au Label 619) devraient y arriver sans difficulté. La narration est fluide, efficace, sans temps mort, rythmé par un chapitrage réussi. Chaque nouvelle partie est introduite par une fausse (et très jolie) affiche d’un film auquel a participé Jin Ha. N’oublions pas les savoureuses fiches explicatives sur la façon de faire un bon film. Elles apportent une touche d’humour dans un récit qui en manque parfois. Il en résulte une excellente lecture qui donne envie de découvrir le reste de la bibliographie de Baptiste Pagani. Voilà qui prouve la qualité de cette bande dessinée malheureusement passée sous les radars et donc restée trop méconnue.

Portrait de Hong Kong, des images qui bougent…

Cela faisait très longtemps que je n’avais pas vu autant de films dans une période aussi ramassée. C’est que les « images qui bougent » et moi, ça fait deux depuis pas mal d’années… Il faut remonter à ma dernière venue au Festival International du Film d’Animation d’Annecy en 2010. Motivé par la participation en avril-mai d’une partie de mes petit·e·s camarades mangaversien·ne·s au programme Portrait de Hong Kong au Forum des Images à Paris, j’ai fini par prendre aussi ma carte d’abonné pour pouvoir assister à quelques séances. À l’arrivée, parmi les soixante-quinze films proposés, j’en ai pu voir une dizaine et me faire une idée plus précise de ce que représente la diversité des films estampillés HK dont j’ignorais à peu près tout. Voici donc un petit compte-rendu de ces différents visionnages, complétés par trois rencontres auxquelles j’ai assisté, plus pour passer le temps vu l’horaire tardif de certaines projections.

D’après le dossier de presse, Portrait de Hong Kong avait pour but de nous montrer un cinéma qui n’existe plus, notamment celui des films d’action de la Nouvelle Vague des années 1980-1990 (par exemple ceux de Tsui Hark, Johnnie To et Ringo Lam). Ces hommes ne dédaignaient pas de porter un message politique, ce qui a causé la disparition de ce type d’œuvres du fait de la censure qui s’est développée au fil du temps après la rétrocession de 1997 (annoncée en 1984). Le réalisateur Wong Kar-wai en est un autre exemple, plus récent. Il a été aussi proposé quatre films contemporains, inédits, et une flopée d’autres qui ne sont liés au cycle que par son invité d’honneur : Christophe Gans. La semaine qui lui a été dédiée n’a entrainé qu’inintérêt (quasi) total en ce qui me concerne.

Filatures

de Yau Nai-hoi (2007)

Si, à l’origine, je ne devais voir que ChungKing Express sur le conseil de a-yin, j’ai décidé au dernier moment fin mai d’aller passer une partie de mon dimanche à aller voir avec deux camarades mangaversien·ne·s le film Filatures sans réelle idée de ce qui était proposé. Du coup, l’abonnement au cycle au lieu de payer une place à chaque fois s’est imposé tant il serait rapide de l’amortir. Le film, simple à suivre, efficace, bien rythmé, plutôt réaliste, montrant un coin de Hong Hong populaire après la rétrocession, avec un duo intéressant (Kate Tsui en débutante et Simon Yam en mentor bourru) opposé à un criminel intelligent (Tony Leung, mais un autre : Kai-fai, pas Chiu-wain le seul et unique vrai Tony Leung), s’est révélé être très plaisant à voir même avec une fin un peu facile. Une bonne façon de rentrer dans le cycle.

Chungking Express

de Wong Kar-wai (1994, version remastérisée et remontée de 2021)

C’était donc une bonne idée de commencer par Filatures car Chungking Express n’a pas été aussi simple à appréhender. Avec un grand usage de la caméra portée à l’épaule et tourné en pleine rue en nous plongeant immédiatement sans explication dans l’histoire, avec deux romances indépendantes dont le lien est ténu, pour ne pas dire inexistant, j’ai eu du mal à apprécier les deux parties du film (surtout la première). En point positif, en ce qui me concerne, il n’y a guère à retenir que les images de deux quartiers de Hong Kong des années 1990 et l’actrice Faye Wong (mais Tony Leung fait un bien joli policier, surtout quand il est en uniforme). C’est peu pour un film qui est considéré comme un des meilleurs issus du cinéma hongkongais… Heureusement qu’un spécialiste du cinéma asiatique (Frédéric Monvoisin, un chercheur) était là pour nous donner, après la séance, quelques explications et clés de compréhension sur ce qui nous avait été proposé. Intéressant !

Hong Kong 1941

de Leong Po-chih (1984)

Ayant à rentabiliser un certain abonnement en juin, j’étais curieux de voir le point de vue hongkongais de l’arrivée des Japonais dans l’île en décembre 1941. Mal m’en a pris tant le film était à la limite de l’irregardable : surjoué au-delà de toute caricature, présence d’un triangle amoureux non-crédible, méchants très méchants, situations peu plausibles, etc. Rien n’allait si ce n’est de nous montrer la collaboration (souvent par intérêt personnel) d’un peuple pris en otage par la duplicité d’une armée occupante cruelle. Pour moi, il y avait aussi la possibilité voir Chow Yun-fat jeune. Projeté tardivement (21h) en plein milieu de semaine, c’était une belle erreur de ma part d’y être allé et mes deux camarades mangaversiennes ont d’ailleurs pensé un peu la même chose tant c’était s’imposer beaucoup de fatigue pour pas grand-chose.

Far Far Away

de Amos Wong (2021)

Place au cinéma actuel avec deux films très récents vu lors d’un week-end de juin. Far Far Away est une romance centrée sur Hau (joué par le peu connu Kaki Sham), un informaticien plutôt introverti et timide. On le suit à travers différentes relations (généralement courtes et platoniques) avec des filles vivant dans différents lieux de Hong Kong, généralement dans les « nouveaux territoires » ou les petites îles aux alentours. L’intérêt de ce film est de voir un autre Hong Kong, plus marin, plus champêtre aussi, sans immeubles anciens plus ou moins délabrés et tours modernes immenses. J’avoue n’avoir accroché au récit qu’avec la dernière partie (heureusement la plus longue), lorsque Melanie (Jennifer Yu) teste les sentiments de son placide amoureux. Ceci dit, amatrices et amateurs de coups de foudre et de déclarations fougueuses, passez votre chemin, le film explore le sentiment amoureux sous son aspect pratique, plus que romantique.

The Way We Keep Dancing

de Adam Wong Sau-ping (2021)

À la différence de Far Far Away, nous n’étions plus que deux dimanche pour The Way We Keep Dancing, un film mettant en avant la culture hip-hop de Hong Kong, son utilisation commerciale et la disparition des friches industrielles de Kowloon. Celles-ci avaient donné un lieu aux artistes de tout genre pour développer leur art : danse, musique, graphe, etc. La critique de l’évolution de ce fameux quartier, faisant aussi penser à la transformation de Kwun Tong, est ici transparente. Sans conteste, il s’agit là de mon film préféré sur les dix vu lors du cycle. Les personnages sont bien définis, la difficulté de vivre de leur art et leurs dilemmes aussi. Les actrices et acteurs sont toutes et tous excellents, mentions particulières à Cherry Ngan (l’actrice montante), Babyjohn Choi (le youtubeur à succès) et Heyo (le rappeur).

Time and Tide

de Tsui Hark (2000)

Il manquait un film d’action dans mon programme et, malgré l’heure tardive de sa projection, étant à Paris un vendredi, j’en ai profité pour aller voir Time and Tide, à la réputation flatteuse. D’ailleurs, nous étions nombreux dans la salle, et notre petit groupe comptait cette fois sept personnes (avec le renfort de plusieurs non-mangaversiens). Efficace à défaut d’être crédible, et avec des plans et des cadrages impressionnants, le film a permis de passer un très bon moment de détente même si le récit est souvent confus et les motivations des personnages ne sont pas toujours claires.

The Happenings

de Yim Ho (1980)

Film de remplacement (la projection de l’inédit Intruder ayant été annulée au dernier moment), c’est le plus mauvais film (quoique Hong Kong 1941…) que j’ai pu voir lors de ces « portraits » de Hong Kong. Les personnages sont tous détestables par leur stupidité (y compris les flics), le film contient plusieurs scènes homophobes et transphobes, le sexisme est omniprésent et la bande son, criarde et au volume trop fort, cassait les oreilles. Bref, le film avait tout faux et j’en connais une qui a bien regretté d’être venue le voir. Pour ma part, je n’ai que pu me réjouir de la fin tragique de la plupart des protagonistes. Il faut dire que je n’avais pris mon ticket que pour passer le temps avant de pouvoir voir le film suivant.

Viva Erotica

de Derek Yee (1996)

Un réalisateur de films que l’on pourrait définir comme étant des « œuvres exigeantes » ne connait que des échecs commerciaux. Sa carrière risque donc de s’arrêter là s’il n’accepte pas de tourner un « catégorie III », c’est-à-dire un film interdit aux moins de 18 ans (soit en raison de scènes sexuellement explicites, ou offensantes, ou à la violence / l’horreur extrême). Il s’agit ici de réaliser un film érotique avec la petite amie du producteur, une actrice taïwanaise débutante qui joue extrêmement mal. Viva erotica est une comédie, une métafiction, et même une parodie du cinéma hongkongais avec d’innombrables références et clins d’œil qui nous ont échappé à moi et à Tanuki. Heureusement qu’a-yin nous a donné quelques explications et informations après la projection (sachant que beaucoup ont dû lui échapper). Bénéficiant d’un humour plutôt subtil, de scènes oniriques et de quelques plans sur la très belle poitrine dénudée de Shu Qi (la fameuse taïwanaise… que j’ai pu voir par ailleurs dans Le Transporteur de Luc Besson il y a quelques années), nous avons pu passer un excellent moment de cinéma.

La 36e Chambre de Shaolin

de Liu Chia-liang (1978)

Le cinéma hongkongais, c’est aussi les « films de kung-fu » et j’ai donc attendu la dernière journée pour aller voir ce genre, centré sur les arts martiaux. Après tout, j’aimais bien suivre la série bien nommée étant gamin, celle avec David Carradine. Je n’allais donc pas rater un film-référence !Comme prévu, je l’ai trouvé ridicule, certaines scènes en devenant comique (mais je ne pense pas que c’était le but du réalisateur). Néanmoins, malgré les invraisemblances, le jeu limité et artificiel des acteurs (pas de femme ou si peu dans cette histoire), je n’ai pas vu passer le temps trop lentement, les 1h55 se sont révélées supportables. J’ai bien fait de faire l’effort de voir ce film, ça m’a conforté dans l’idée que les films de la Shaw Brothers ne sont pas pour moi.

The Grandmaster

de Wong Kar-wai (2013)

Dans la foulée, j’ai préféré voir The Grandmaster à Limbo pour des raisons très terre à terre (l’horaire de projection), et aussi parce qu’il parait que c’est un excellent film de kung-fu, mais moderne, celui-là. Ah ? C’est vrai pour le côté moderne, aussi bien pour le rythme dans les combats (qu’ils étaient lents, ceux de La 36e Chambre de Shaolin) que pour la qualité des images ou du jeux des acteurs et actrices (j’aurai aimé plus de Tony Leung et moins de Zhang Ziyi, ceci dit). Mais où était l’histoire ? Avec un récit bien trop décousu et de nombreuses longueurs n’apportant rien, je me suis ennuyé la plupart du temps. Qu’elles ont été longues, les 123 minutes de la projection… La malédiction de la salle 500, sans doute. L’autre gros reproche, c’est que la production n’a pas jugé bon d’investir dans le maquillage des personnages principaux qui passent plus de vingt années à travers de nombreuses vicissitudes, entre plusieurs combats d’arts martiaux, l’invasion japonaise (mal traitée) en 1937-39, la guerre civile (inexistante à l’écran) qui a suivi, sans prendre une ride ou du poids. Bref, j’ai trouvé le film très mauvais et ça m’a confirmé que j’ai bien un problème avec Wong Kar-wai et sa conception du cinéma. Un manque certain de références culturelles peut-être ? Mais bon, je ne regrette pas ce choix, j’ai ainsi amélioré ma connaissance du cinéma hongkongais (relativement) récent et j’ai vu ce que pouvait donner un film cofinancé par la Chine continentale.

Les rencontres

Il n’y a pas grand-chose à dire sur les trois rencontres auxquelles j’ai assisté, j’y suis allé plus pour passer le temps avant la projection des films prévus que par réel intérêt. L’assistance était d’ailleurs très clairsemée pour les deux premières. La table ronde « Hong Kong 2024 : quel avenir pour les artistes ? » n’était pas inintéressante mais convenue et prévisible. Les témoignages de Lok Kan Cheung (une artiste du vivant, réfugiée politique en France, notamment organisatrice via CUBE [C3] du Festival des arts hongkongais d’Annecy) et de Justin Wong (dessinateur réfugié à Londres, dont une BD est disponible en français) confirmait ce que l’on peut penser de la censure imposée par la Chine continentale depuis plusieurs années. La « rencontre BD Golden Path. Ma vie de cascadeuse de Baptiste Pagani » était certes très bien animée par Xavier Guilbert (comme toujours) mais ni l’œuvre ni l’artiste ne m’intéressaient…

Au moins, le temps est passé assez rapidement lors de ces deux rencontres. Car le pire était à venir, même si je m’y attendais. Le « cours de cinéma par Fabien Gaffez (directeur artistique du Forum des images) » intitulé « Esthétique de la rétrocession (leurs années sauvages) » était une purge tant les sur-interprétations des films allant jusqu’au ridicule, le langage ampoulé, et les certitudes assénées par l’animateur étaient totalement inintéressantes. Mais bon, c’est ça la critique cinéma : quelques idées noyées dans une masse de bullshit ! Et ça a duré 2h30 au lieu des 1h50 « promises » ! Heureusement qu’il y avait de nombreux extraits de films pour aider à passer le temps. Vu l’heure, j’aurai mieux fait d’aller au resto mais je déteste y être seul. Et comme mes deux camarades mangaversien·ne·s préféraient assister à la conférence…

À l’arrivée, je ne regrette pas d’avoir changé d’avis et d’avoir suivi plutôt assidument le programme de juin alors que j’avais boudé les mois d’avril et mai (sans rater grand-chose à mon goût, aidé par un système de double date de diffusion). Cependant, je ne vais pas enquiller avec la rétrospective de « La Shaw Brothers et le kung-fu » à la Cinémathèque, faut pas déconner, hein ! 🙂