Journal d’un AssaSynth

AssaSynth est une SecUnit, c’est-à-dire une créature hybride robot / humain spécialisée dans la sécurité et dans le renseignement (l’un n’allant pas sans l’autre). Ses capacités physiques et logicielles sont très supérieures à quasiment tout le monde, humains comme bots ; seules les CombatUnits sont supérieures aux SecUnits. Il y a quelques temps, AssaSynth a été à l’origine d’un massacre perpétré dans une mine lointaine, gérée par GrayCris, une corporation à la moralité douteuse (comme toutes les corporations regroupées au sein de la Bordure Corporatiste). Cependant, iel a tout oublié, à quelques réminiscences près liées à la partie organique de son être. En effet, iel a été réinitialisé après cet « incident » dont il ne reste nulle trace dans les archives publiques. Ne voulant plus que cela se reproduite, AssaSynth a décidé de pirater son module superviseur, ce logiciel qui l’oblige à obéir à un son superviseur, que celui-ci soit une IA ou un humain. Bien entendu, cette prise d’autonomie reste cachée grâce à d’excellentes qualités de hacker, ce qui permet à iel de se faire passer pour une SecUnit bien obéissante, surtout pas séditieuse. Pour passer le temps, iel est devenu accro aux séries multimédias qu’iel a téléchargé en masse en toute discrétion. Son feuilleton préféré ? Apogée et déclin de la Lune sanctuaire aux très nombreux épisodes.

Lors d’une mission qui aurait dû être de routine (la sécurité et la surveillance d’une équipe de chercheuses et de chercheurs de Préservation, une obscure entité étatique non corporatiste), AssaSynth doit utiliser toutes ses capacités pour sauver ses clients d’une machination diabolique et inévitablement mortelle. Ce faisant, iel a dû avouer à ses « clients » qu’iel avait son libre arbitre, ce qui leur avait sauvé la vie. Heureusement, Préservation est une de ces rares nations sociales-libérales qui prônent le bonheur individuel dans l’autonomie, le partage et la générosité. C’est ainsi qu’une longue lutte contre une corporation sans scrupule va l’amener à découvrir les causes, les conséquences et surtout son rôle dans le massacre qui a été perpétré sur Milu. Différentes rencontres vont permettre à iel de mieux se sentir, de prendre conscience de qui lui importe et ainsi de décider ce qu’iel veut faire en tant que SecUnit « libre », deux termes pourtant antinomiques. Ces rencontres comprennent le Dr Mensah (la dirigeante de Préservation), EVE (un Emmerdeur de Vaisseau Expéditionnaire), Miki (un robot dégoulinant de bons sentiments), Trois (une autre SecUnit) et bien d’autres encore…

Martha Wells est une romancière américaine née au Texas (où elle vit toujours) en 1964. Après avoir terminé son Bachelor of Art en anthropologie, elle sait qu’elle veut devenir écrivaine. Comme il faut bien vivre, elle commence à travailler, notamment en support informatique, un boulot qui lui laisse du temps libre pour écrire son premier roman, Le Feu primordial (L’Atalante, 2002, traduction de Patrick Couton). Celui-ci parait en 1993 chez Tor Books, ce qui lance sa carrière d’auteure professionnelle. Durant ses années de lycée et d’université, elle avait écrit de nombreuses fanfics et même proposé sans succès des textes à différents magazines alors qu’elle suivait les cours d’écriture de science-fiction et de fantasy de Steven Gould (Martha Wells a aussi participé à un atelier d’écriture dirigé par Bruce Sterling). Il s’ensuit une carrière très prolifique que l’on peut principalement regrouper en trois univers : Ile-Rien (cinq romans disponibles chez L’Atalante, sortis aux USA entre 1993 et 2006), Books of the Raksura (cinq romans, deux recueils de nouvelles, tous inédits en français, publiés entre 2011 et 2017) et Journal d’un AssaSynth (cinq novellas et un roman, série débutée en 2017). Martha Wells a aussi commis plusieurs œuvres de commandes pour les franchises Stargate (2006 et 2007), Star Wars (2013) et Magic (2018). Enfin, elle a également écrit deux romans de fantasy pour adolescents (2013 et 2014). Il faut ajouter à cela deux romans indépendants (1995 et 2000) et une douzaine de nouvelles écrites entre 1995 et 2020. Journal d’un AssaSynth est la série à succès de Matha Wells. Un succès qui l’a d’ailleurs surpris, ainsi que son éditeur, Tor. Il faut dire que le ton employé fait merveille, en tout cas en français grâce à la traduction décomplexée de Mathilde Montier. En avril 2021, Thor.com a annoncé la signature d’un contrat pour six histoires dont trois concerneront AssaSynth (probablement deux novellas et un roman qui se situeraient après Effet de réseau). Le prochain titre, qui relèvera de la fantasy, est Witch King qui est annoncé pour la rentrée 2022, sans plus de précision.

Les quatre premières novellas forment une histoire complète, même si chacune est auto-conclusive. Défaillances systèmes définit le cadre du récit, défini l’univers de la série, présente les personnages récurrents (uniquement le Dr Mensah et son entourage ; le vaisseau expéditionnaire EVE apparait dans Schémas artificiels.) et met en place un arc narratif en plaçant AssaSynth au centre de la série. Narrée au passé et à la première personne, les novellas mettent l’accent sur les compétences insoupçonnées de SecUnit qui, au fil des chapitres et des rencontres, développe ses capacités en combat rapproché (il ne s’agit plus de foncer dans le tas et voir ensuite le résultat), sa maitrise du piratage informatique, et la profondeur de ses analyses tactiques. Effet de réseau est le seul (pour l’instant) roman de la série. Durant les quatre cents et quelques pages de l’histoire, la patience et les aptitudes d’AssaSynth sont mises à rude épreuve. Ses humains (notamment la fille du Dr Mensah dont il est le garde du corps) sont en grand danger. De plus, il doit sauver EVE et son équipage malgré le très mauvais tour que le vaisseau lui a fait. Il faut dire que la Xeno-technologie à laquelle iel est confronté est aussi redoutable qu’imprévisible. Ici, Martha Welles commence à développer la facette humaine d’AssaSynth qui est de plus en plus en proie à des sentiments comme la colère, la jalousie et l’impatience. Cependant, cela va de paire avec une empathie qui se développe en même temps.

Télémétrie fugitive est avant tout une histoire policière en huis-clos… mais d’un genre spécial puisqu’elle se passe dans une station spatiale et qu’AssaSynth doit enquêter pour retrouver l’assassin d’un homme totalement inconnu des différents services de Préservation. Notre SecUnit redoute que cela cache une tentative d’assassinat du Dr Mensah par GrayCris, cette corporation sans foi ni loi. Iel est bien loin de la vérité comme iel le découvrira petit à petit. Dans cette novella, Martha Wells rend hommage aux romans policiers dont elle est si fan et explique comment AssaSynth a réussi à trouver sa place dans Préservation et comment les services de cette entité gouvernementale ont réussi à accepter qu’une « machine tueuse » puisse être quelqu’un de libre et responsable. De ce fait, le récit est plus posé qu’habituellement et propose peu de moments épiques. Cela ne nuit pas au plaisir de lecture, étant donné les nombreux dialogues savoureux que la romancière nous propose tout au long de sa dernière œuvre en date. Au fil des pages, la romancière accentue le côté humain d’AssaSynth, continuant ainsi l’évolution de la série amorcée dans Effet de réseau, et fait le pont entre les quatre premières novellas et le roman. Nul doute que les prochaines histoires continuent dans cette direction, notamment en approfondissant les relations entre AssaSynth et EVE, et en développant la psychologie de cette dernière, véritable intelligence non-organique supra-humaine.

Des lectures SF de circonstance

Bannière des lectures SF de circonstance

Le confinement donne du temps pour les loisirs. Un des plus appropriés est la lecture de romans (épais de préférence). N’ayant pas fait suffisamment d’achats lors de l’habituelle (mais en pause) tournée des librairies du quartier Saint-Michel à Paris lors des « courses du samedi », et ayant du mal à être transporté par une de mes lectures actuelles, je me suis retrouvé à ressortir un épais diptyque de ma bibliothèque. Chose amusante, je me suis aperçu que mes trois dernières lectures de science-fiction ont une résonance certaine avec les circonstances actuelles.

La vie après la pandémie

Roman Les enfermés

Les Enfermés de John Scalzi se passe dans un futur relativement proche après qu’une pandémie appelée « la grande grippe » ait tué plus de quatre cents millions de personne à travers le monde. Surtout, certaines victimes ont survécu en étant transformées par la maladie : suite à certaines complications entrainant une inflammation du cerveau, elles se sont retrouvées totalement coupées du monde extérieur. Si une petite minorité des malades connurent « l’enfermement », cela a représenté pour les États-Unis plus de quatre millions de victimes, dénommés sous le terme de « haden ».

Heureusement, la science et la médecine ont réussi, non pas les guérir, mais à les sortir de cet isolement : un monde virtuel, « l’Agora », hébergé sur de puissants serveurs dédiés, leur est devenu accessible et les « enfermés » peuvent littéralement se projeter dans des androïdes pour pouvoir interagir avec le monde extérieur. D’autres malades ne connaissent pas l’enfermement mais développe la capacité d’héberger l’esprit de hadens et ils peuvent ainsi louer leur corps pendant un temps réduit. Ce sont des « intégrateurs ». Bien entendu, plus vous êtes riche, meilleures sont vos possibilités de vivre socialement dans les deux mondes, le virtuel et le réel : nous sommes aux États-Unis, après tout.

Chris Shane, haden depuis sa plus tendre enfance, est depuis peu un agent du FBI. Il travaille par envie de faire quelque chose d’autre de sa vie qu’être un porte-drapeau des personnes de sa condition. En effet, son père, ancien champion de NBA et investisseur avisé, a mis toute sa famille à l’abri du besoin matériel. Dès ses débuts dans ses nouvelles fonctions, et sous la houlette de Leslie Vann, sa co-équipière qui traine comme de bien entendu un lourd passé, il se retrouve à enquêter sur une affaire de meurtre d’un intégrateur. Les circonstances peu claires dans la réalisation de cet homicide semblent révéler une affaire complexe concernant des personnes puissantes de la communauté haden.

Ce roman policier / SF se lit facilement grâce à l’écriture à la première personne, nerveuse et fluide, de John Scalzi, ce que l’on ressent dans la traduction de Mikael Cabon. Ce dernier officie aussi sur les autres livres de Scalzi ainsi que sur les Chronique des rivages de l’Ouest d’Ursula K. Le Guin comme et la série La Longue Terre de Baxter et Pratchett. Les dialogues, nombreux, s’enchainent bien et les parties de récitatif éclairent bien la situation et les enjeux. Il en résulte une lecture distrayante qui captive lectrices et lecteurs jusqu’au dénouement. Certes, il y a quelques ficelles et facilités scénaristiques que nous pourrions regretter mais elles permettent à John Scalzi de garder un rythme élevé et à nous distraire jusqu’au bout. Il en résulte un roman assez court qui est complété par une nouvelle écrite sous la forme de différents entretiens permettant de mieux comprendre le monde mis en place par l’auteur. Il existe une autre enquête de Chris Shane : Prise de tête.

Vivre dans un monde post-apocalyptique

C’est sous l’influence (et le cadeau du premier tome) d’a-yin que je me suis attaqué depuis février à la lecture des Livres de la Terre fracturée de N.K. Jemisin. Cette trilogie nous transporte dans un monde en proie aux tremblements de terre et où des cataclysmes périodiques provoquent la disparition des civilisations qui ont réussies à se développer, ne laissant que quelques survivants en prise à des hivers interminables qui marquent l’entrée de chaque nouvelle saison. L’Humanité est, globalement, divisée en trois castes, celle des « normaux », celle des « orogènes » et celle des « gardiens ». La première, la plus nombreuse, s’organise en citées qui utilisent la deuxième (qui est sous le contrôle de la troisième) pour gérer au mieux les tremblements de terre qui les menacent. En effet, les orogènes ont le pouvoir de contrôler les soubresauts terrestres en tirant l’énergie de la Terre, notamment des volcans. Pourtant, loin d’en faire des héros, ce pouvoir les a transformés en semi-parias que tout le monde déteste. Il faut dire que les orogènes peuvent vous tuer de différentes façon sans la moindre difficulté et même involontairement lorsqu’ils ne maitrisent pas leur pouvoir, ce qui est le cas lorsqu’ils sont trop jeunes pour avoir appris.

Essun, une puissante orogène qui cachait son pouvoir à la communauté qui l’avait accueillie, a découvert son domicile vide et son jeune fils mort sous les coups de son mari, Jija, qui s’est enfuit avec leur fille, Nassun, après avoir découvert la terrible malédiction qui frappait (de son point de vue) sa famille : ses deux enfants étaient des orogènes, ce qui lui avait été dissimulé. Essun, dévastée, décide de les retrouver, coûte que coûte ! Nous suivons aussi Damaya qui vient de découvrir ses pouvoirs et qui est confiée à une organisation, le Fulcrum, chargée d’éduquer et de former les orogènes. Enfin, dans une troisième trame narrative, nous accompagnons Syénite, une orogène prometteuse ayant terminé sa formation et retrouvant le monde extérieur pour sa première grande mission en compagnie du plus puissant agent du Fuclcrum : Albâtre. Cependant, le véritable but de cette sortie est d’enfanter ce qui pourrait devenir le meilleur orogène de tous les temps.

Le premier des trois romans commence avec une narration à la deuxième personne du présent, ce qui est très déstabilisant. Ajoutez à cela un style assez froid, des personnages tous moins sympathiques les uns que les autres, et vous avez une entrée en matière extrêmement difficile. Les deux autres personnages sont suivis de façon plus traditionnelle : à la troisième personne. Ce n’est pas pour autant que ça soit plus amusant à lire car il est impossible de ressentir la moindre empathie pour quiconque. Le style utilisé est assez littéraire avec une narration très descriptive, avec peu de dialogues. Chaque chapitre est assez long (dans les 25 pages) et chacun se révèle assez pénible à lire, les pires étant ceux concernant Essun. Ce n’est pas avec le deuxième tome que ça s’arrange, même si on ne suit qu’Essun et Nassun. Nous y retrouvons le même style même si certains chapitres sont plus courts. Le tome 3 est de la même veine, il ne faut pas espérer d’amélioration sur le style. Si l’effort littéraire de Jemisin est à saluer, si le monde que l’auteure a mis en place est fascinant, très bien construit, si les personnages sont intéressants, cela reste quand même difficileà lire, il faut le dire. Et je suis certain que ça ne vient pas de la traductrice, Michelle Charrier dont j’avais su apprécier le travail sur l’excellent La Fiancée du dieu Rat de Barbara Hambly (une de mes auteures préférées).

Vivre dans l’incertitude

Je l’avais annoncé dans mon premier billet consacré à la science-fiction, je l’ai fait : je suis en train de relire le diptyque Black-Out et All Clear de Connie Willis. Il faut dire que n’ayant plus aucun livre de John Scalzi à lire (et pas envie de commander sur Internet pour l’instant), j’avais besoin de lire en parallèle aux Livres de la Terre fracturée quelque chose de plus enlevé afin de contrebalancer le style « pénible » de N.K. Jemisin. Quoi de mieux que Connie Willis dont la facilité de lecture, l’humour (même en décrivant des événements graves ou tragique), sont quasiment inégalables. De plus, nous avons là une œuvre tout à fait en raccord avec le temps présent, c’est-à-dire l’incertitude des lendemains et la tension permanente que nous subissons du fait des contraintes qui s’exercent sur tout le monde. Certes, il est mal venu de comparer les horreurs de la Seconde guerre mondiale et notamment du Blitz qu’a subit Londres entre septembre 1940 et mai 1941 avec une maladie qui est terrible surtout dans le fait qu’elle montre les faiblesses sanitaires et économiques de nos sociétés actuelles, trop mondialisées. Il n’en reste qu’il y a un écho certain dans cette lecture. Après tout, nous sommes « en guerre contre le coronavirus » !

Les deux épais tomes de Biltz (le nom de l’édition omnibus) se déroulent dans le cadre des aventures temporelles du département Histoire de la prestigieuse université d’Oxford. Nous avions pu lire les terribles aventures de Kivrin dans Le Grand livre, ainsi que les hilarantes mésaventures de Ned dans Sans parler du chien. Il est d’ailleurs préférable d’avoir lu le premier des deux titres pour mieux apprécier le début de Black-Out tant l’auteure ne prend pas de temps de présenter son univers. Nous sommes censés le connaître, tout comme nous sommes censés connaître le professeur Dunworthy qui dirige une équipe d’étudiants en histoire qui peuvent utiliser un transmetteur temporel afin d’étudier de visu le sujet de leur thèse. Normalement, leur présence ne peut pas provoquer de paradoxe temporel, aucune porte ne s’ouvrant entre les deux époques s’il y a le moindre risque. Néanmoins, en sommes-nous vraiment certain ?

Polly, Merope (pardon, Eileen) et Michael (Mike !) sont trois étudiants du professeur Dunworthy. Elles et il ont besoin d’aller en Angleterre pendant la Seconde guerre mondiale dans le cadre de leurs études. La première veut observer les effets du Blitz sur la population londonienne réfugiée dans les abris lors des bombardements. La deuxième étudie l’évacuation des enfants de Londres et leur vie dans la campagne anglaise. Quant au troisième, il étudie les héros inconnus, ces gens comme vous et moi qui accomplissent des actes valeureux que l’Histoire n’a pas gardé en mémoire. Pour cela, il doit aller à Douvres voir l’évacuation de la poche de Dunkerque. Bien entendu, rien ne va se passer comme prévu, malgré toutes les précautions exigées par le professeur Dunworthy. Surtout, les trois vont vite se rendre compte que les portes temporelles ne s’ouvrent plus pour leur permettre de retourner en 2060, ce qui les amène à se demander, de plus en plus angoissés, ce qu’il se passe. En attendant les secours, il faut réussir à vivre en temps de guerre, alors que la mort peut survenir à n’importe quel moment.

Les romans relevant des voyages temporels de l’université d’Oxford sont toujours basés sur un sens du détail, une certaine rigueur historique, notamment dans la vie de tous les jours de la période concernée. La problématique des paradoxes temporels est au cœur du dytique (tout comme il l’était dans Sans parler du chien) : qu’est-ce qui fait que le voyage dans le passé (aller dans le futur n’est pas possible) ne risque pas de modifier l’Histoire ? Tout simplement en ne rendant pas possible le voyage dans le temps à certaines époques et à certains endroits. Toutefois, Connie Willis essaye d’aller plus loin dans sa réflexion et, notamment en appliquant la théorie du chaos, essaye de montrer que même involontairement et en prenant toutes les précautions à auxquelles on peut songer, voyager dans le temps peut entrainer des bouleversements. Cette réflexion est surtout développée dans All Clear tout en gardant le même rythme, le même humour et la même verve. Magistral, même si quelques péripéties auraient pu être évitées et nous infliger un peu moins de délayage. Comme nous à lire (la traduction de Joëlle Wintrebert ne semble souffrir d’aucun défaut), Connie Willis semble s’être bien s’amusée à écrire, avoir du mal à quitter Polly, Merope, Michael mais aussi Colin, Mary et bien d’autres personnages.

Retour vers la S.F.

Depuis quelques mois, je me suis remis à lire de façon notable de la science-fiction, cette littérature du Futur. En effet, alors que ça faisait de nombreuses années que je me contentais de suivre les (rares) sorties des œuvres de Lois Mc Master Bujold, Vernor Vinge, Tim Powers, Ian M. Banks, Sheri S. Tepper ou de Connie Willis, mon temps de lecture étant accaparé par la bande dessinée, je suis revenu à la S.F. en 2019. Il s’agit là d’un retour vers un passé qui commençais à être lointain.

Adolescent, j’étais un gros lecteur des publications du Fleuve Noir, avant d’estimer en avoir fait le tour et de m’intéresser aux publications de J’AI LU, Denoël et Pocket. J’ai ainsi accumulé ainsi des milliers d’ouvrages (la plupart étant dans des cartons empilés dans le grenier du garage). Au début des années 2000, en revenant au manga (et rejoignant la communauté Mangaverse), j’avais quasi-abandonné ce genre littéraire (que je ne suivais plus que de façon espacée, d’ailleurs).

Ce n’est que récemment que je suis revenu à cette ancienne passion, sous l’influence d’a-yin, grande lectrice de mangas mais aussi de vieilleries… pardon, de classiques de la science fiction qui ne m’ont jamais intéressé. L’année 2017 a été le premier pas effectué en direction de ce retour avec La Ménagerie de papier de Ken Liu, offert pour mon anniversaire. Un auteur récent, donc que je ne connaissais pas… Ayant adoré ce recueil, je complétais cette découverte par les deux novellas parues aussi au Belial. Néanmoins, ça aurait pu rester sans suite, malgré la lecture la même année de La Reine rouge de Lois Mc Master Bujold et d’Interférences de Connie Willis.

Il faut dire que l’année 2018 n’avait pas été marquée par des sorties concernant mes auteur·e·s fétiches. J’ai toutefois réussi à rater le dernier Neal Stephenson et deux Ken Liu, c’est dire à quel point mon intérêt était retombé. C’est alors qu’a-yin (toujours elle) m’a fait plusieurs piqures de rappel : en suivant mes conseils de lire les titres de Connie Willis et de Vernor Vinge, et devant son enthousiasme envers le dyptique Blitz de la première et Un feu sur l’abîme du second (les joies des petits prix chez Book·off), je me suis mis à les relire.

Néanmoins, l’élément déclencheur a été le conseil donné en avril 2019 par kinoumenthe (avec qui je partage une passion pour le travail de Lois Mc Master Bujold) concernant la série de quatre novellas intilutée Journal d’un AssaSynth écrit par Martha Wells. Coïncidence, ce conseil était combiné avec la sortie de la version française chez L’Atalante. J’ai adoré ! Pour enfoncer le clou, c’est à nouveau a-yin qui m’a fait acheter à tout petit prix (donc lire) du Ursula K. Le Guin (Le Livre d’or) et du Alain Damasio (La Horde du Contrevent). Pire : elle m’a offert Les Dépossédés d’Ursula K. Le Guin et l’omnibus Récits du Vieux Royaume de Philippe Jaworski pour mon dernier anniversaire. Pour compléter ce retour à la lecture d’auteurs français (alors que j’en lisais quasiment plus depuis au moins vingt ans), je me suis intéressé à la sortie du dernier roman d’Olivier Paquet : Les Machines fantômes.

C’est ainsi que je me suis retrouvé à retourner de façon assidue sur Noosfere (site que je n’ai jamais réellement abandonné) et même à lire quelques blogs sur la SF. Et voilà que la chronique enthousiaste (avis partagé par d’autres sites) du blog Albedo me fait essayer (et adorer là aussi) L’Effondrement de l’Empire, le tome 1 de la série L’Interdépendance de John Scalzi. Imaginez que j’ai même remis les pieds dans un magasin spécialisé S.F. (La Dimension Fantastique) fin juillet, à qui il faut que je commande les Martha Wells introuvables (et pourtant toujours commercialisés et réédités comme La Mort du nécromant) et d’autres John Scalzi (tant qu’à faire le déplacement). Et voilà comment on opère un retour vers le passé !