Soli Deo Gloria

Édouard Cour nous revient plus de trois années après une œuvre formidable, ReV, parue en 2022 chez Glénat. Avec Soli Deo Gloria, comme avec chacune de ses nouvelles créations, l’auteur nous propose une bande dessinée très différente graphiquement des précédentes. Le thème est lui aussi une nouveauté pour le bédéiste. Il met ici en images l’histoire d’un autre, Jean-Christophe Deveney, scénariste et enseignant de son état. Cette fois, le récit se place dans un XVIIIe siècle plein de bruit et de fureur, mais aussi de musique chrétienne. En effet, nous suivons deux jumeaux, Hans et Helma, de leur naissance dans une campagne arriérée située dans le Saint-Empire Germanique à la magnificence de Rome en passant par Venise, Amsterdam et Leipzig. Les aléas de la vie et leur amour de la musique, qu’elle soit instrumentale ou vocale, vont leur permettre de dépasser leur condition paysanne miséreuse et connaître les ors de la haute société européenne. Leurs talents et leur soif d’apprendre sont tels qu’ils réussissent à se faire remarquer à plusieurs reprises par de puissants personnages et, ainsi, à parfaire leur art. Néanmoins, attention à rester humble et à ne pas se croire supérieur à ce que l’on est réellement sous peine de chuter plus bas que terre.

Soli Deo Gloria reprend de nombreux codes du roman d’apprentissage, genre apparu en Allemagne au XVIIIe siècle (tiens, tiens…) au point d’en être une caricature en cochant tous les points abordés dans la fiche Wikipédia. C’est d’ailleurs là la faiblesse de cet ouvrage : un scénario un peu trop convenu et manquant d’originalité, de surprise, quoique très bien documenté du point de vue historique. Le nom des personnages historiques et des villes sont changés pour marquer l’aspect fictionnel de l’histoire sans que cela apporte quoique ce soit au récit. Pourtant, Jean-Christophe Deveney n’est pas un débutant dans cet exercice, comptant plusieurs dizaines de créations. L’auteur de la présente chronique a d’ailleurs eu l’occasion d’en lire quelques-unes mais seule l’œuvre collective Héro(ïne)s : la représentation féminine en bande-dessinée a réellement trouvé grâce à ses yeux avant Soli Deo Gloria. Heureusement, le titre est porté par le graphisme somptueux d’Édouard Cour. Utilisant à nouveau un noir et blanc agrémenté de touches de couleur signifiantes, l’artiste change à nouveau de registre, plus réaliste et s’essaye à un mélange de techniques de dessin sur papier et d’ajouts numériques. Le résultat est bluffant, magnifique, une fois de plus. L’exposition-vente à la galerie Achetez de l’Art de certaines des planches originales permet d’ailleurs de mieux apprécier ce travail en comparant celles-ci aux pages imprimées.

Dans une vidéo promotionnelle de Dupuis, Édouard Cour explique à un moment sa volonté de revenir au dessin en noir et blanc, ainsi que de donner un certain effet à ses planches en posant (peignant) numériquement deux types de trames, une foncée et une plus claire. Le résultat est plus que concluant, mais malheureusement, il ne ressort correctement que sur la version imprimée de l’œuvre, les trames ne supportant pas les réductions imposées par une lecture sur un écran, que ça soit celui d’une liseuse / tablette ou d’un ordinateur. Il y a ainsi de la matière, du volume dans les décors. Les sons sont représentés par des traits acérés qui forment des mots, si on regarde bien. Ce sont de véritables onomatopées, mais plus visuelles que lisibles. Les touches de couleurs sont principalement utilisées pour la musique et le procédé fonctionne bien. Ce n’est pas la première fois qu’Édouard Cour se frotte à la représentation visuelle de la musique. Il y a quelques années, il avait été chargé de créer des représentations visuelles pour le Centre de Documentation de la Musique Contemporaine.

Il s’agit d’une des sorties les plus marquantes de l’année, en tout cas sur le plan visuel, avec un sujet pouvant toucher un public bien plus large que celui des lectrices et lecteurs de bandes dessinées. Par ailleurs, une lecture avec, en fond sonore, une playlist de musiques baroques, à commencer par les titres les plus connus de Vivaldi et de Bach, est conseillée.

Auteurs : Jean-Christophe Deveney & Édouard Cour
Éditeur : Dupuis
Prix : 30 €
Format : 24 x 32 cm, 280 pages
Couverture : Cartonnée
ISBN : 9791034768974
Date de sortie : Octobre 2025

Existe aussi en version numérique

Dorohedoro, la Chaos Edition

Pratiquement six ans après la sortie de son vingt-troisième et dernier tome, la série mythique Dorohodoro revient dans une « Chaos Edition », regroupant à chaque sortie deux volumes de la parution originale. Le quatrième opus est attendu pour début octobre. Voilà l’occasion de revenir sur un titre qui a eu du mal à trouver son public pendant des années avant de devenir culte auprès du lectorat francophone.

Deux mondes se côtoient : Il y a Hole, où (sur)vivent des humains, dans une société en pleine décomposition. De plus, ceux-ci sont victimes de mages qui vivent dans une autre dimension et qui viennent s’exercer et s’amuser à les transformer en diverses choses, selon leur talent magique. Leur pouvoir résulte de leur personnalité et le résultat est souvent imprévisible. Certains peuvent vous transformer en champignon, d’autre vous découper en rondelles sans vous tuer, d’autre encore peuvent vous faire fondre ou vous transformer en saurien, en insecte, etc. Des mages, aux pouvoirs très recherchés, peuvent vous soigner et vous retaper physiquement quel que soit l’importance de vos blessures. Il se dit même que certains mages peuvent ressusciter les morts ou maitriser le temps…

L’histoire commence à Hole où Caïman, un humain (?) amnésique dont la tête est celle d’un lézard, cherche à tuer tous les mages qu’il rencontre, mais seulement après avoir vérifié qu’il ne s’agissait pas de celui qui l’a transformé. Il est assisté dans sa quête par Nikaido, la tenancière d’un restaurant de gyozas et redoutable combattante. Cependant, à force de tuer des mages alors que ceux-ci ont plus l’habitude d’être des chasseurs que des proies, notre duo attire sur lui l’attention d’En, le dirigeant (de fait) du monde des mages. Il s’agit d’un mage surpuissant qui bénéficie de l’aide de Chidamura, le premier et le plus puissant des diables. Ces derniers sont des anciens mages qui ont réussi à s’élever à un niveau supérieur après un entrainement très sélectif et réservé aux meilleurs.

Deux des plus puissants acolytes d’En se lancent à la recherche de Caïman et de Nikaido : Shin (un demi-humain) et Noï. Ce sont deux puissants combattants, aux pouvoirs magiques redoutables. L’affaire devrait être donc rondement menée… sauf que l’homme-lézard est insensible à la magie. Celle-ci s’exprime sous forme de fumée, une fumée de poudre noire que peuvent produire tous les mages, la quantité dépendant de leur puissance magique. Il se révèle assez rapidement que Caïman semble lié à une secte, celle des « yeux en croix » qui regroupe des minables, ceux qui sont incapables de produire leur propre fumée. Il y a de nombreuses années, En a déjà eu affaire à leur chef et ne s’en est sorti que de justesse. Il pensait s’en être débarrassé. Il faut dire que dans un monde où la mort est rarement permanente, aucune victoire ne peut être définitive !

C’est avec un plaisir sans limite que l’on se (re)plonge dans l’univers original, nonsensique et gore mis en place dans Dorohedoro. Cela grâce à la présence de personnages peu manichéens, à de nombreux dialogues décalés proposant un humour teinté d’autodérision, et une histoire se déroulant deux mondes particulièrement bien étudiés. Le tout donne une atmosphère très particulière accentuée par le graphisme immédiatement reconnaissable de Q-Hayashida, l’autrice. Il est à la fois lâché et très sombre. L’influence de l’artiste suisse H.R. Giger et de ses peintures biomécaniques est manifeste, mais aussi de l’œuvre de l’artiste japonais Kenji Yanobe célèbre pour ses sculptures issues d’un univers dystopique. La narration reste un modèle de rythme et de clarté malgré les multiples trames scénaristiques. Grâce à des analepses toujours bien gérées, on apprend petit à petit le passé de certains personnages, même si les informations sont souvent données avec parcimonie.

Il ne faut pas compter sur le All Star Guide Book (sorti à l’occasion de la nouvelle édition de Dorohedoro) pour en savoir beaucoup plus, surtout à propos des personnages plus que secondaires. Nous avons bien droit sur près de la moitié de l’ouvrage à une fiche sur quasiment toutes les personnes et « bestioles » rencontrées tout au long du récit, mais ça ne présente pratiquement aucun intérêt. L’autre grosse moitié consiste en de courtes histoires. Si les deux premières (chacune faisant environ 25 pages) ne sont pas inintéressantes, le reste est totalement dispensable. Ce reste consiste en de courtes saynètes de trois ou quatre planches en couleurs, ou plus exactement qui mélangent plusieurs bichromies. À la fin, on se retrouve donc avec une soixantaine de pages sur les 220 qui valent le coup d’être lues. Même si le prix de ce guide book est très serré pour une fabrication très qualitative qui a dû demander beaucoup de travail de traduction et de mise en plage, voilà une sortie à réserver aux plus fans d’entre nous.

Pour en revenir à la Chaos Edition, chaque tome reprend donc deux volumes de la série originale, avec les pages couleurs, même lorsqu’elles sont intérieures. Le format est le même, mais les planches sont ici infiniment mieux reproduites car l’éditeur bénéficie cette fois du matériel japonais au lieu de devoir scanner la version japonaise. La traduction a été revue par Sylvain Chollet afin de lui donner plus de « pep’s ». Il s’était occupé de la version française durant les seize années de la première version. L’adaptation graphique de GB One a été entièrement refaite par Anne Demars, la lettreuse de Dorohedoro depuis 2008 : le gain est manifeste. Sur la jaquette, nous retrouvons l’effet « peau de serpent » des tous premiers tomes des années 2003-2004, sans embossage mais avec un vernis sélectif 3D. C’est donc une très belle édition qui nous est proposée, même si on apprécierait une couverture une peu moins souple. Ne boudons donc pas notre plaisir et remercions Iker Bilbao, le directeur éditorial de Soleil Manga de nous permettre de (re)découvrir un des meilleurs mangas actuellement disponibles en français.

FIBD 52, bravo les expos !

À la différence de l’année précédente, je n’avais prévu d’être sur le festival que deux jours et demi au lieu des quatre et demi de 2024, en raison d’un programme peu motivant sur le papier. Une demi-journée perdue pour cause de panne de voiture (heureusement, au départ de l’hôtel le vendredi matin), il ne me restait plus assez de temps pour profiter pleinement de la cinquante-deuxième édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême. Du coup, comme peu de rencontres m’intéressaient, j’ai « sacrifié » la bulle du Nouveau Monde par manque de temps au profit des expositions me motivant le plus. J’ai bien fait tant celles-ci étaient variées et réussies cette année, que ce soit celles montées par 9e Art+ ou celles proposées par la Cité.

Les expositions du festival

Sur les neuf expositions « officielles » du festival, je n’en ai fait que cinq. Sur les sept de la Cité, j’en ai fait quatre. Et sur ce total de neuf, quatre ont été faites plutôt rapidement, plus pour voir à quoi elles ressemblaient et prendre des photos (pour éventuellement lire des cartels plus tard). Elles ne m’intéressaient pas plus que cela. Il sera possible de voir de nombreuses photos de la plupart des expos dans le prochain compte rendu « Des Mangaversien·ne·s à Angoulême ».

Le vendredi a été le plus « productif » car en une demi-journée, j’ai visité Plus loin, la nouvelle Science-Fiction puis Super-Héros & cie, l’art des comics Marvel et enfin Lou ! Cher journal… (là, je l’ai plus parcourue qu’autre chose par manque de temps). Clou de la journée : la quasi-inaccessible L’Atelier des sorciers : la plume enchantée de Kamome Shirahama (visitée en nocturne en entrée payante avec horaire choisi). Le samedi, journée habituellement infernale tant il y a du monde partout, a commencé par Posy Simmonds. Herself, suivie par la traversée au pas de course de Constellation graphique, jeunes autrices de la bande dessinée d’avant-garde. Cela s’est ensuite terminé par la visite express (trop de monde, pas d’intérêt pour le sujet, mais j’ai quand même acheté le catalogue) de Gou Tanabe × H.P. Lovecraft, visions hallucinées. J’ai tout de même eu le temps de remarquer que les planches « originales » du mangaka sont bien plus intéressantes que le produit fini qui est alourdi par les effets informatiques et les trames posées à la truelle. Enfin, le dimanche a été consacré à l’exposition Superman. Le héros aux mille-et-une-vies, tout en profitant de sa proximité (car situé sur le chemin) pour voir l’hommage rendu à Fawzi, le routard du crayon.

La tradition de privilégier les planches originales a été respectée à chaque fois même si les reproductions étaient aussi présentes en nombre. La scénographie était travaillée avec un gros travail sur les décors et les ambiances pour les expositions dites « immersives ». C’était le cas des trois expos mangas (même si je n’ai pas fait celle sur Vinland Saga) ainsi que celles dédiées à Superman, la SF et à Lou.

J’ai beaucoup apprécié l’expo SF pour la diversité des planches et des thèmes même si ça manquait de Fabrice Neaud (l’excellent mais boudé Nu-men, ainsi que Labyrinthus). Par contre, joie ! Il y avait du Édouard Cour avec ReV. Bien entendu, il y avait les habituelles planches de Mézières, mais on ne s’en lasse pas, tout comme celles de Mœbius. L’expo dédiée à Superman était vraiment réussie alors que je n’apprécie pas le personnage et que j’avais quelques doutes étant donné que depuis quelques années, ce n’était pas vraiment ça, les expos au Vaisseau Mœbius. Celles du Musée de la BD étaient, elles aussi, meilleures que celles que la Cité nous proposaient depuis Calvo, un maître de la fable (réalisée à l’époque en partenariat avec 9e Art+, ce qui doit expliquer sa qualité). Les expos au Musée de la BD et au Vaisseau Mœbius sont toujours là (sauf la très bonne expo consacrée à Marvel qui vient de fermer), donc si vous passez dans le coin…

L’exposition consacrée à Posy Simmonds était très intéressante car très différente des deux que nous avions pu voir auparavant (à Pulp Festival et à la BPI), avec un développement intéressant sur les auteurs et autrices qui avaient notablement influencé l’autrice. Elle est visible au Musée d’Angoulême jusqu’à la mi-mars, il est encore possible d’en profiter. Par contre, oubliez Constellation graphique, ça ne présente aucun intérêt. Il faut dire que la BD d’Avant-garde n’a que très rarement eu l’heur de me plaire et là, ce n’était pas le cas.

Des expositions en libre d’accès

Un certain nombre d’expositions sont accessibles sans être festivalier. En effet, entre le Off, le Off du Off et d’autres activités profitant du festival, il y a de quoi faire. De plus, la bande dessinée espagnole était à l’honneur cette année, ce qui se concrétisait, entre autres, par Le 9e Art espagnol à l’honneur sur le parvis de l’Hôtel de Ville qui dressait un intéressant panorama. J’ai profité d’un court instant de répit pour voir ce que l’Association du FIBD proposait cette année : un recensement photographique des fresques BD disséminées dans la ville. Enfin, trois d’entre nous sommes allés à l’exposition-vente Quand la SF se fait prophétesse afin de rendre un dernier hommage à Florian Rubis, co-commissaire mort subitement quelques jours avant l’ouverture du festival et que j’avais prévu de saluer à cette occasion.

Conclusion

Ce fut donc une édition tournée vers les expositions, ce qui est d’ailleurs ce qui nous intéresse le plus à Angoulême (sauf pour l’un d’entre nous qui préfère les rencontres de toutes sortes). Je n’ai suivi que trois rencontres le samedi, la masterclass de Posy Simmonds (qui se déroulait partiellement en même temps que celle de John Romita Jr, il faut le faire…), la rencontre internationale « “So British!” La BD, un art de l’underground ? » avec Bryan Talbot, Joff Winterhart et Jon McNaught mais malheureusement mal animée (il aurait fallu laisser seul Paul « magnific » Gravett aux commandes), et ce qui était presque plus une conférence, « Une femme du Japon, rencontre autour de Shinkirari, de l’autre côté du rideau, la liberté » .

Cela fait peu. J’aurai bien aimé assister à « Super-héros japonais… made in France ! Rencontre avec Mathieu Bablet & Guillaume Singelin, auteurs de Shin-Zero » mais j’étais un peu empêtré dans mes petits problèmes de voiture à 30 kilomètres de là. J’étais plus proche pour « La nouvelle science-fiction » avec Lisa Blumen, Guillaume Singelin, Mathieu Bablet et Ugo Bienvenue, mais je ne pouvais pas arriver assez vite car il y avait un peu trop de chemin à faire entre le Champs de Mars et le Vaisseau Moebius pour le temps dont je disposais. J’ai donc préféré aller à Manga City pour papoter avec quelques copains éditeurs. Chez IMHO, j’ai tout raté : plus de Claude Leblanc en dédicace, et même plus de son nouveau bouquin (mais Benoit s’est arrangé pour corriger ça, et merci à Claude pour sa gentille dédicace après coup). À l’arrivée, c’est une édition qui s’est révélée plus plaisante que prévue grâce à des expositions de grande qualité, ce qui était moins le cas depuis quelques années.

Je remercie 9e Art+, l’Agence La Bande, notamment Arnaud Labory, Anaïs Hervé et Vincent-Pierre Brat, l’Association FIBD Angoulême, la Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l’Image pour tout leur travail et la possibilité de nous permettre de profiter du festival dans des conditions privilégiées. Je remercie aussi Manuka pour sa relecture.

Mangaverse, 20 années d’expositions

Décembre 2024 est passé ; c’est une date anniversaire représentant 20 années d’expositions (avec un petit groupe de Mangaversien·ne·s). Voilà donc une bonne occasion de faire un petit retour en arrière sur 460 visites, après celui fait il y a six ans à l’occasion de ma 300e exposition.

Pour être comptabilisée comme telle, je rappelle que je ne dois pas avoir fait l’exposition seul (il y en a quelques unes dans ce cas, par exemple Goscinny et le cinéma en 2017 ou Alix, l’art de Jacques Martin en 2020 ), elle doit être temporaire tout en ne se limitant pas au temps d’un festival ou d’une convention (ce qui en élimine un certain nombre, notamment lors du FIBD ou du SoBD). Enfin, je dois en avoir une trace photographique (ce qui en élimine deux, de mémoire, dont une en 2002 sur des kimonos).

Quelques chiffres

Pour se remémorer cette période, rien ne vaut quelques petits graphiques et tableaux. Commençons par une représentation du nombre de visites d’exposition par an :

Nous voyons une progression sur la toute fin des années 2000, et qui va jusqu’au pic de 2017, même s’il y a eu un petit décrochage à un moment. Ce pic m’avait d’ailleurs conduit à écrire un billet sur ce qui devenait une boulimie et de la nécessité de se calmer un peu. L’essor du nombre de visites des années 2009-2012 correspond à l’arrivée de beanie_xz sur Paris pour ses études. Son entrée dans le monde du travail a donc provoqué un premier recul. Nous observons aussi un gros décrochage lors des années COVID puis un retour vers la normale qui devrait être atteint en 2023. En effet, si la moyenne annuelle est de 23 expositions, je considère qu’il ne faut pas prendre en compte les 5 premières années et les deux concernées par le COVID, ce qui nous donne une moyenne de 30.

La quantité c’est bien, le contenu, c’est mieux. Le tableau suivant classifie ces 460 expositions selon leur thème principal :

TypeNombre d’expositions
Architecture14
Arts108
BD-Comics-Manga-Illustration162
Cinéma13
Culture Asiatique38
Culture autres régions25
Culture Occidentale16
Design10
Divers20
Jeux vidéo3
Jouets4
Littérature4
Mode8
Photo32
Science3
Total 460

Deux thèmes d’expositions sont largement devant les autres : la bande dessinée (au sens large) et les arts. Dans ce dernier cas, il s’agit principalement principalement d’expositions (monographiques, ou thématiques) de peintures, d’estampes ou de sculpture. Mais cela peut aussi relever des arts plastiques, décoratifs, être pluridisciplinaire, ou couvrir un ou plusieurs mouvements artistiques, allant du Moyen-âge à l’art contemporain, avec une appétence très nette pour l’impressionnisme et l’art moderne. Bref, ça ratisse très large… Je m’amuse à lister tous ces expositions sur une page web, les personnes curieuses ont ainsi accès à une liste complète et généralement à jour.

À une époque, nous faisions pas mal d’expositions photo mais cela n’est plus vrai depuis plusieurs années. Les manifestations présentant la culture d’un pays ou d’un continent sont souvent les plus fédératrices (par exemple sur les kimonos, l’art de manger en Afrique ou sur une période historique comme la dynastie Tang). Les expositions relevant de la culture occidentale sont généralement historiques (les Étrusques, la Croatie médiévale, la Régence à Paris par exemple). Par contre, l’architecture n’intéresse qu’une toute petite partie de notre groupe de Mangaversien·ne·s.

Il est important aussi de distinguer le type des institutions concernées. Il y a les Musées loin devant les autres espaces culturels (publics ou privés). Cette distinction de la typologie des lieux fait apparaître l’importante prise par les visites en galeries sur les trois dernières années. Il s’agit dans ce cas d’expo-ventes liées au monde de la bande dessinée, nous permettant parfois de profiter d’un vernissage pour rencontrer l’auteur concerné, pouvant faire ainsi nos fanboys ou nos fangirls.

LieuxNombre d’expositions
Musées235
Espaces culturels / Fondations & instituts / Maisons de la culture147
Galeries44
Bibliothèques / Médiathèques / Cinémathèques 22
Hôtels de ville / Mairies9
Autres3

Les musées sont donc, sans surprise, nos lieux privilégiés. En première place, nous avons le Musée du quai Branly (35). Le Musée Guimet et le Centre Pompidou (29) précèdent ex-æquo de peu le Grand Palais (25). En cinquième position, nous trouvons la Ferme du Buisson (20) à Noisiel, un centre culturel qui proposait de nombreuses petites expositions sur la bande dessinée à l’occasion du Pulp Festival (mais qui duraient au delà du festival). Puis vient le Musée de la bande dessinée d’Angoulême (19). Il ne faut pas confondre ce dernier avec le Musée de la ville d’Angoulême (16) qui suit juste après dans mon classement. En effet, nous profitons du FIBD pour voir les expositions proposées à cette occasion, et elles durent généralement au-delà du célèbre festival de BD. Enfin, la Maison de la culture du Japon à Paris et le Petit Palais (13) ferment ex-æquo la liste des établissements à plus de dix visites.

Comme déjà dit, nous allons de plus en plus dans des galeries d’art pour voir des expositions-ventes de planches originales de BD, surtout depuis le COVID. Dans cette catégorie, la Galerie Barbier (9) est devant la Galerie du 9ème art (6) qui, elle-même, est devant Arts Factory (7). Puis vient la Galerie Martel (4). Néanmoins, c’est la Galerie Huberty & Breyne (3) qui me laisse les meilleurs souvenirs, en raison des auteurs concernés : Fabrice Neaud et Frederik Peeters. Paris regorge de ces lieux, nous pourrions pratiquement y aller toutes les semaines.

Souvenir et nostalgie

Voici une séquence nostalgie avec vingt expositions qui m’ont laissé un excellent souvenir, parfois pour des raisons autre que le thème ou les œuvres proposées.

Première période (2004-2009)

Les débuts, c’est toujours un peu émouvant. Et quels débuts ! Au Grand Palais pour une exposition sur les estampes du Monde Flottant. C’était aussi une époque où les expositions de la Cité des sciences étaient développées, ici sur Le Monde de Franquin. J’ai eu la chance de voir à temps les fameux Musées imaginaires de la bande dessinée au Centre National de la Bande Dessinée et de l’Image d’Angoulême en 2007. Autre exposition non parisienne dont je garde un excellent souvenir, celle consacrée à Émile Cohl au Musée-chateau d’Annecy. Pour clore la période, quoi de mieux que des estampes japonaises ?

Progression (2010-2015)

Il s’agit d’une période d’une grande variété de thèmes avec de la peinture au Grand Palais, de la science-fiction à la Cité des sciences, des phares au Musée de la marine, de la mode aux Arts déco, de la BD (Mézière) à la Mairie du Ve et de l’art contemporain à Beaubourg, Mona Hatoum réussissant l’exploit à me faire voir de l’intérêt dans ce mouvement artistique.

Toujours plus (2016-2019)

L’inflation des expositions ! Il a fallu faire des choix difficiles mais ces quatre ont été particulièrement marquantes : La sonore Grand Orchestre des Animaux à la Fondation Cartier pour l’art contemporain, les photos si déprimantes de Gao Bo. Les offrandes à la Maison Européenne de la Photographie, l’étonnant mélange entre Artistes & Robots au Grand Palais et la musicale Charlie Chaplin, l’homme-orchestre à la Philharmonie de Paris. En fait, j »aurai pu facilement doubler ou tripler le nombre de photos pour ces quatre années.

La période COVID (2020-2021)

Retour aux fondamentaux : la bande dessinée, que ça soit par exemple en galerie avec David B. ou en musée avec Uderzo, a été le thème quasiment unique des expositions vues entre deux confinements et restrictions liées aux jauges.

La reprise (depuis 2022)

Si j’ai choisi de mettre en avant Boldini – Les plaisirs et les jours au Petit Palais, c’est pour montrer que je peux aussi apprécier la peinture figurative, notamment l’art du portrait. L’expo-vente Fabrice Neaud – Le Dernier Sergent à la Galerie Huberty & Breyne illustre l’importance prise par cette activité. Enfin, Métro ! Le Grand Paris en mouvement à la Cité de l’architecture et du patrimoine clos cette rétrospective en 2024, alors que Zombis – La mort n’est pas une fin ? au Musée du quai Branly ouvre une nouvelle période en 2025, ce qui pourrait être le début d’une nouvelle boulimie.

Meurtre télécommandé

Nous sommes aux États-Unis d’Amérique, dans le Maine pendant les années 1980. Un magnat du pétrole, Monsieur Jones, prévoit d’implanter une raffinerie dans une baie jusqu’ici préservée des investisseurs destructeurs de la nature. Il a pourtant l’habitude d’y venir pêcher le samedi. Cependant, cette installation ne se fera pas, Jones est mort, assassiné par un modèle réduit d’avion radiocommandé. L’inspecteur Jim Brady arrive de la capitale pour enquêter, les meurtres relevant de la police d’État et non du shérif local qui voit d’un mauvais œil cette intrusion sur son territoire. Quatre suspects, tous habitants la rive, vont devoir démontrer leur innocence. Il y a M. Kayne, un paysan en semi-retraite à la gâchette menaçante, Valérie Curtin, une encore jeune New-yorkaise venue s’installer loin de la ville pour cultiver divers type de plantes à la campagne. N’oublions pas Joe McLoon, rentier et handicapé toujours armé de son fusil depuis qu’il s’est fait renverser par une petite vieille en voiture, heureusement bien assurée. Il y a enfin Steve Goodrich, riche acteur hollywoodien à la retraite, accompagné d’Erik van Heineken, son fidèle homme à tout faire. Il aime survoler les lieux à l’aide de son U.L.M. Toutes ces personnes n’apprécient vraiment pas la perspective d’une industrialisation de leur environnement si bucolique.

Sous couvert d’une enquête policière, l’histoire est surtout prétexte à brosser cinq portraits assez extrêmes, illustrant une certaine vision de l’Amérique des années 1980. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ensemble n’est pas flatteur pour la patrie de l’Oncle Sam. Est-ce la vision du scénariste, un Hollandais du nom de Janwillem Van de Wetering ? Il est connu pour ses polards publiés en néerlandais et en anglais (nombre d’entre eux sont disponibles en français), devenu écrivain après s’être installé en 1975 aux États-Unis, dans le Maine. La narration particulière, les situations décalées, ainsi que le dessin, portent incontestablement la patte de Paul Kirchner, le créateur de Dope Rider et des strips non-sensiques du Bus. Le second étant fan des romans du premier, l’amitié qui a résulté de leur rencontre a ainsi débouché sur un des premiers romans graphiques, après que Will Eisner ait popularisé cette nouvelle forme de bande-dessinée à la fin des années 1970 et avant que Maus d’Art Spiegelmen y apporte le succès public en 1986. Bien entendu, cela a été un échec commercial total. Ce qui est à ce jour le seul récit long du dessinateur est ensuite tombé petit à petit dans l’oubli avant que Tanibis décide de le rééditer dans un format rendant justice à un graphisme soigné, fourmillant de détails, fleurant bon celui des années 1950-60. Il faut dire que Paul Kirchner a été dessinateur pour Steve Ditko et Wallace Wood, excusez du peu. Quoi qu’il en soit, il s’agit d’une totale réussite, trop en avance sur son temps.

Après une douzaine de pages assez classiques, d’un point de vue actuel, le symbolisme puis le psychédélisme et même le surréalisme (celui de Magritte plutôt que celui de Dalí même si Kirchner se dit inspiré par les deux) sont de plus en plus présents dans le récit. Il en résulte une narration qui a dû dérouter le lectorat américain et qui ne plaira pas à tout le monde. En effet, dans différents entretiens disponibles sur le Net comme dans l’intéressante postface proposée par l’éditeur Tanibis, Kirchner explique son intérêt pour ces courants artistiques, même s’il n’a jamais été intéressé par l’usage de drogues, laissant son esprit explorer le subconscient, à la recherche d’idées. Le style réaliste et épuré du dessinateur fait merveille dans la représentation d’une certaine Amérique, représentée par des stéréotypes représentant un lieu et une époque. Pourtant, le récit ne fait pas daté et pourrait tout à fait se passer actuellement après quelques ajustements liés aux préoccupations actuelles. Van de Wetering était tellement enthousiasmé par le résultat qu’il voulait écrire une autre enquête, mais Kirchner ne pouvait pas se permettre une telle somme de travail sans être correctement rémunéré et a préféré privilégier ses activités plus commerciales, ayant désormais une famille à faire vivre. Puis le Hollandais est mort prématurément d’un cancer en 2008. C’est ainsi que l’inspecteur Jim Brady n’a jamais repris du service alors que Kirchner estime que Meurtre télécommandé est sa meilleure œuvre. Il est peut-être dommage pour nous de ne pas avoir de suite, mais nous avons ainsi une expérience de lecture unique, ce qui rend cette bande dessinée encore plus exceptionnelle.

Auteurs : Paul Kirchner & Janwillem van de Wetering
Traduit par : Patrick Marcel
Éditeur : Tanibis
Prix : 23€
Format : 22 x 28 cm, 112 pages en noir & blanc
Couverture : Cartonnée
ISBN : 9782848410708
Date de sortie : Novembre 2022

FIBD 2023 : Sélection Fauve Polar SNCF

SoBD 2024

L’année des festivals, salons et conventions se termine traditionnellement pour notre petit groupe de Mangaversien·ne·s début décembre avec le Salon des ouvrages de Bande Dessinée. Cette édition était particulière pour moi, pouvant faire mon fan-boy auprès d’un des deux invités d’honneur. En réalité, je me suis contenté d’écouter Fabrice Neaud lors de ses tables rondes (j’aurais pu aller à sa masterclass du vendredi soir si je m’étais mieux organisé) et d’admirer les planches exposées au Musée éphémère, quasiment un an après en avoir vu une belle série lors de son expo-vente à la Galerie Huberty & Breyne. Qu’est-ce que c’est bô ! 🙂

Traditionnellement, nous nous rendons le samedi après-midi à SoBD surtout pour trois activités : faire le tour des stands afin de réaliser quelques achats, suivre des rencontres / tables rondes et admirer les planches exposées au Musée éphémère. Cette année, je dois avouer que j’ai passé peu de temps sur les stands, me contentant de trois exposants : J’ai, LGBT BD et Stripologie. Il s’agissait pour moi, avant d’aller écouter Fabrice Neaud, d’acheter le dernier numéro du fanzine J’ai dans lequel j’ai une de mes (rares) contributions au groupe Facebook éponyme, de bavarder un peu avec quelques « J’AIistes ». J’en profite pour remercier Hugo pour la Po-j’ai-te spéciale cartes PLG. Ensuite, je n’allait pas manquer d’aller acheter le tome 1 (dédicacé) du recueil Le Mini de la Semaine de Jean-Paul Jennequin et de l’écouter parler (c’est toujours aussi fascinant, surtout quand a-yin est en face pour le relancer).

Une fois terminé le cycle des tables rondes avec Fabrice, je suis allé acheter les numéros (encore disponibles) de la deuxième version de Bananas dans lesquels il y a des contributions dudit Fabrice, information donnée par Évariste Blanchet lors de la présentation de la célèbre revue. C’est qu’il ne fallait pas tarder pour les numéros 2 et 3 dont il s’agissait des derniers exemplaires (le 4 est encore en vente en ligne). Ainsi, j’ai d’autres créations des débuts de Fabrice Neaud qui viennent s’ajouter à celles de la défunte revue ego comme x. J’ai aussi ramené Meurtre télécommandé (un achat en défraichi d’a-yin sur le stand de Tanibis), une lecture du lendemain qui s’est révélée être excellente, dont j’ai prévu un billet WordPress et un achat futur, en plus de m’intéresser de plus près à Paul Kirchner.

Comme toujours, le Musée éphémère proposait une belle et dense sélection de planches. Il y en avait environ 80 qui couvraient un peu moins de trente années de créations de Fabrice Neaud. Cette exposition rétrospective permettait d’apprécier l’évolution graphique de l’auteur, dont le dessin s’est affiné au fil des ans, notamment sur la représentation des volumes et de la lumière. Néanmoins, son style réaliste reste immédiatement reconnaissable (tout comme sa narration), les fondamentaux étant déjà en place trente années auparavant. J’ai tout particulièrement apprécié la présence de planches d’Alex et la Vie d’après (je n’ai qu’un PDF en basse définition) et de Nu Men. Je pleure toujours de ne pas pu avoir de tome 3 alors que appréciais tout particulièrement cette série de science-fiction (bien plus que Labyrinthus), ce qui a entrainé une fin précipitée et plutôt ratée de mon point de vue. Néanmoins, le plus intéressant était de voir quelques-uns des fameux carnets de Fabrice. Leur qualité graphique est incroyable !

Repas bulled’air oblige, je ne suis pas resté à la remise du Prix du récit dessiné de la Scam ni à celui du prix SoBD Neuvième art. Il faut dire aussi que ce n’est pas un exercice qui m’intéresse tout particulièrement. Toujours du fait d’un conflit d’emploi du temps, je ne suis pas retourné dimanche pour essayer d’avoir une dédicace de Fabrice Neaud (j’en ai obtenu une en début d’année au FIBD, la troisième en vingt ans) ou pour mieux regarder la petite exposition consacrée à la bande dessinée luxembourgeoise, le pays invité. Toutefois, l’édition 2024 restera dans mon esprit comme une très bonne cuvée (avec 2018 et quelques autres plus anciennes) malgré le peu de temps passé sur place.

Angoulême 52, c’est reparti !

Ce jeudi 21, sous une météo de plus en plus neigeuse sur la Région Parisienne (ce qui m’a rappelé l’édition 2006 du FIBD et son samedi interrompu par la neige), a eu lieu la conférence de presse de la cinquante-deuxième édition du Festival International de la Bande Dessinée d’Angoulême, cette fois sise au Musée de la Marine. La priorité étant donnée aux foutus réseaux sociaux, nous étions déjà au courant de la majeure partie du programme des expositions (ce qui intéresse le plus notre petit groupe de Mangaversien·ne·s). Néanmoins, j’ai toujours envie de m’y rendre, année après année, histoire de lancer (dans mon esprit) cet événement annuel francophone qu’est le FIBD, ainsi que pour revoir quelques connaissances.

Dans un auditorium bondé (les 200 places étaient toutes prises), les discours de Franck Bondoux, le délégué général, de Marguerite Demoëte, la directrice artistique et de Fausto Fasulo, le directeur artistique Asie, ont confirmé l’évolution amorcée l’année dernière : la volonté de s’adresser au jeune public afin de former les futurs lecteurs et futures lectrices à culture de la bande dessinée. S’appuyant sur les réseaux sociaux, les pôles Jeunesse et Manga sont devenus les fers de lance du festival. Les expositions doivent être « participatives et festives » tout en suscitant l’envie de lire. Moi qui aime le sobre et le travaillé, on ne peut pas dire que ça m’enchante plus que ça. Néanmoins, heureuse surprise pour cette prochaine édition : une nouvelle mise en avant du comics, celui dit « grand public » que je connais si mal, notamment avec une grande exposition consacrée à Superman. Le retour de la tradition du pays invité (l’Espagne pour 2025, après le Canada en 2024) montre aussi une volonté de continuer à développer une dimension cosmopolite, notamment par le biais de rencontres entre éditeurs du monde entier qui se fera, comme depuis quelques temps, dans une bulle dédiée. Ainsi, le festival mérite bien son qualificatif d’international.

Nous avons donc huit expositions d’importance qui nous seront proposées entre le 30 janvier et le 2 février (dès le 29 janvier pour la presse et les pros). Au Musée d’Angoulême, il n’y aura pas de manga, une première depuis 2016. À la place, nous aurons « Posy Simmonds. Herself » (jusqu’à la mi-mars) ainsi que « Hyper BD : une exposition dont vous êtes les héro-ïne-s » qui sera, pour cette dernière, interactive et s’adressant à un plus jeune public. Au Vaisseau Moebius, nous pourrons voir « Superman, le héros aux mille-et-unes vies » qui durera jusqu’au 10 mars. La médiathèque L’Alpha hébergera « l’immersive » exposition dédiée à « Vinland Saga : une quête d’identité ». Il faudra beaucoup de courage et de patience pour aller voir « L’Atelier des sorcières : la plume enchantée de Kamome Shirahama » car située dans l’Hôtel Saint-Simon et sa jauge minuscule. Il faudra aussi avoir du temps à perdre pour aller voir « Gou Tanabe x H.P. Lovecraft : visions hallucinées » dans la salle Iribe de l’Espace Franquin tant je pense qu’elle sera fréquentée. Ce sera d’ailleurs la seule exposition qui bénéficiera d’un catalogue. « Julie Birmant, les herbes folles » mettra en valeur la scénariste primée l’année dernière par l’institut René Goscinny à travers ses créations pour (notamment) Clément Oubrerie et Catherine Meurisse, ça se passera au Musée du papier (jusqu’à la mi-mars). Enfin, le Quartier Jeunesse abritera l’exposition « La BD règle ses contes » qui présentera cinq univers, ceux de L’Encyclopédie du merveilleux, d’Émile et Margot, des Contes fabuleux de la nuit, des Sept Ours nains et de La Quête. Une exposition présentant la diversité de la bande dessinée espagnole sera accessible sur le parvis de l’Hôtel de Ville en plus de celle qui se trouvera dans la bulle dédiée à l’Espagne.

Il est encore bien trop tôt pour avoir la liste de toutes les autrices et tous les auteurs invités mais nous avons cinq « masterclass » annoncées : Posy Simmonds, John Romita Jr, Gou Tanabe, Kamone Shirahana et Makoto Yukimura, les trois dernières se déroulant au Théâtre d’Angoulême. Je dois avouer que ce ne sont pas ces trois derniers noms qui m’intéressent le plus, loin de là. Le Quartier Jeunesse proposera de nombreuses animations à destination d’un public familial, notamment grâce à l’espace gagné sur feu les Studios Paradis et le développement de la Halle des découvertes. Mais cela ne concernera pas vraiment notre petit groupe de Mangaversien·ne·s, il faut le dire. En ce qui concerne les éditeurs présents, ils seront nombreux à Manga City (les plus importants seront tous là) et nous ne manquerons pas de passer dire un petit bonjour à certains d’entre eux comme Akata, IMHO, Kana, Kotoji, Naban, etc. sans oublier d’aller voir les manhua de Hong Kong et de Taïwan. Globalement, il n’y a pas de réel changement au niveau des bulles éditeurs et, comme tous les ans, nous passerons bien plus de temps au Nouveau Monde sur les stands de certains éditeurs ou dans la partie fanzine qu’au Monde des bulles. Il faut me l’avouer, nous serons peut-être plus intéressé·e·s par le programme du Musée de la Bande Dessinée, à commencer par l’exposition « Super-héros & Cie. L’art des comics Marvel » mais aussi « Plus loin. La nouvelle science-fiction », « Trésors des collections » et pour au moins l’un d’entre nous « Lou ! Cher journal… ». Car, en effet, le programme annoncé par le festival ne nous enthousiasme pas plus que cela.

Comme tous les ans, je n’ai pas vraiment de commentaire à faire sur les différentes sélections, me contentant de me réjouir de la présence de tel ou tel titre ou de constater que la bande dessinée asiatique hors manga est toujours aussi ignorée par le festival. D’ailleurs, il y a beaucoup moins de bande dessinées japonaise en lice cette fois et c’est tant mieux tant je trouvais que ça faisait forcé / copinage depuis quelques années. Les cinq titres mis ici en avant ont fait ou vont faire l’objet de billets sur ce présent blog et leur sélection m’a donc fait tout particulièrement plaisir. Cette sélection officielle permet aussi de se rappeler que tel ou tel ouvrage que l’on avait raté à l’époque de sa sortie mérite qu’on s’y attarde et qu’il est peut-être temps de songer à s’y mettre. Car, il faut le dire, je n’ai pas lu grand-chose cette année : six titres (plus deux autres de prévus) sur les 44 de la sélection officielle, ça fait peu. En patrimoine, j’en suis à deux plus un, et c’est tout… Voilà qui confirme que je me suis un peu éloigné de la bande dessinée en 2024.

Grâce à une équipe renforcée, la nouvelle direction artistique du festival prend de plus en plus ses marques, et c’est tant mieux même si elles n’ont pas l’heur de me plaire (et je dirais que c’est une bonne chose pour la réussite publique du festival). Je continue à regretter les années du Manga Building (nostalgie, quand tu nous tiens) ou les années Beaujean (mais là, ce n’est pas de la nostalgie, juste une préférence pour ce qui nous était proposé durant ces années-là). Il n’empêche que je ne doute pas un seul instant de passer deux bonnes journées et demi à Angoulême entre le 30 janvier et le 2 février. D’ailleurs, il ne faudra pas oublier d’aller manger une fois dans le Quick devant l’Hôtel de ville, histoire de fêter le nouveau sponsor titre du festival 🙂

Je remercie Manuka pour sa relecture, ainsi que 9e Art+ et l’Agence La Bande, notamment Vincent-Pierre Brat, pour leur invitation à la conférence de presse de l’édition 2025 du FIBD.

Formula Bula, ça pétille plus

Il y a un an, j’étrillais dans un de mes billets la onzième édition de Formula Bula tant la version proposée à Césure n’avait pas eu l’heur de me plaire. Ce qui ne m’a pas empêché d’aller voir, avec mes petit·e·s camarades bulledairo-mangaviersien·ne·s, ce que pouvait proposer la douzième édition. Grand bien m’en a fait tant cette visite a été plutôt plaisante. Il me faut remonter aux sixième et neuvième éditions pour en avoir un souvenir équivalent. Voici donc le compte-rendu d’un après-midi passé à Censier à faire des dépenses pour des BD, assister à des rencontres et revoir un certain nombre de connaissances…

Des rencontres intéressantes

C’était bien la première fois que j’assistais à des rencontres intéressantes dans le cadre de Formula Bula. Le petit « seul en scène » de Bill Plympton qui revenait sur sa carrière d’illustrateur et d’animateur était plaisant à suivre, bien rythmé, bien traduit (mais l’Américain avait un accent très compréhensible) et entrecoupés d’œuvres iconiques. Les quarante-cinq et quelques minutes sont ainsi passées très rapidement. Heureusement, il était ensuite possible de discuter librement avec l’auteur sur son stand situé à l’entrée du Village des éditeurs tout en lui achetant une illustration si possible, histoire qu’il n’ait pas fait la retape pour rien à la fin de son show.

Il est difficile d’être aussi enthousiaste pour le dialogue entre Nicole Claveloux et l’historienne de l’art Éva Prouteau. Centrée uniquement sur la nouvelle publication de l’autrice, Ce soir c’est cauchemar (aux Éditions Cornélius), ce qui aurait pu faire une bonne conférence a fait une mauvaise rencontre et ce n’était pas la faute de Nicole Claveloux. Le principe est d’entendre l’autrice parler de son œuvre, pas de subir les longs monologues de l’animatrice, même s’ils étaient intéressants quoiqu’un un peu trop fournis en exemples redondants ou un peu surinterprétés. Bosser son sujet ne suffit pas, il faut savoir aussi animer…

Le Village des éditeurs

Toujours situé au même endroit, mais avec une aération améliorée tout simplement grâce à des fenêtre ouvertes sur les trois côtés, le Village des éditeurs ne m’a pas plus attiré que cela. Pour ma part, je n’ai passé du temps que sur quatre stands : Cornélius, Même pas mal (mais il n’y avait pas Olivier Texier en dédicace, je n’ai pas pu faire mon fan-boy), Mémoire d’images et The Hoochie Coochie avec peu d’achats à l’arrivée. Je verrai à faire mieux lors de SoBD qui s’annonce intéressant… Il faut dire que l’exiguïté du lieu, la petitesse des stands, une fréquentation nettement plus importante que l’année dernière ne me poussaient pas à faire des folies. Je continue à regretter le côté bucolique du Village lorsqu’il était situé autour de la Médiathèque Françoise Sagan… du moins lorsqu’il faisait beau, ce qui n’était pas trop le cas cette année et qu’il était donc préférable d’être en intérieur vu le temps maussade.

Des expositions à revoir

L’organisation de ce qui est pompeusement appelées « expositions » est à revoir en profondeur. Il faut en proposer moins et surtout les développer pour les mettre en valeur. Ce ne sont pas quelques originaux accompagnés de textes (pas inintéressants, il faut le reconnaître) qui vont donner envie de venir à Formula Bula. C’est vraiment dommage que ce point n’ait pas été amélioré par rapport à l’année dernière, il y avait de quoi faire quelque chose d’intéressant avec Bill Plympton et Nicole Claveloux, surtout qu’en ce qui concerne cette dernière, nous étions plusieurs à avoir pu visiter l’exposition qui lui était consacrée à Angoulême 2020. La comparaison a fait très mail…

De l’espace à récupérer

Pour moi, il y a deux espaces à déplacer afin d’avoir des allées latérales plus larges dans le Village des éditeurs et donc plus rendre celui-ci plus circulable en période d’affluence. L’espace jeux et animations n’était pas plus fréquenté que cela, c’est vraiment de l’espace perdu et les ateliers pourraient être déplacés dans des anciennes salles de cours. Le lieu appelé le Grand Plateau (l’ex-grande bibliothèque de Censier) est quand même assez exigu malgré les 1 000 m² annoncés. La cantine / bar située du côté de la porte 2 n’était pas trop fréquentée cette fois et nous avons pu, malgré le temps un peu frisquet et humide, boire notre petite bière à la terrasse.

Conclusion

Formula Bula 12 a permis, cette année, de passer un bon moment convivial avec des Mangaversiens et une Mangaversienne, des Bulledairiens et des J’AI. Néanmoins, l’étroitesse du lieu ne permet pas une programmation ambitieuse et ramassée en un lieu unique. Il ne reste plus qu’à voir ce que la prochaine édition nous proposera, après tout, l’entrée est gratuite…

Une vision du cinéma hongkongais : The Golden Path

Dans le cadre du cycle « Portrait de Hong Kong » proposé durant l’été 2024 par le Forum des images (auquel j’ai consacré un billet) une rencontre (disponible sur YouTube) avec le bédéiste Baptiste Pagani a permis à une partie des personnes présentes (dont votre serviteur) de découvrir un auteur et une œuvre : The Golden Path, ma vie de cascadeuse. La lecture de cette bande dessinée s’étant révélée excellente, voici une petite chronique qui va essayer de rendre honneur au travail de cet auteur fan de cinéma d’action hongkongais de la fin du vingtième siècle.

Fin des années 1980 : Jin Ha débarque du Continent à Hong-Kong en espérant faire une carrière d’actrice cascadeuse dans les films d’action hongkongais dont elle est si fan depuis tout le temps. Sortie diplômée « artiste martiale » d’une école réputée de kung-fu de la province du Henan et munie d’une recommandation à présenter au cousin d’une de ses professeures, la voilà perdue au milieu d’une grande ville, de plus parlant très mal le cantonais. Heureusement pour elle, ses qualités de combattante, son courage, son ardeur au travail (et un peu de chance) lui permettent de réaliser rapidement son rêve : elle travaille dans un des principaux studios de cinéma auprès de celui qu’elle admire depuis toute petite, Eagle Chan. Malheureusement pour elle, un rien peut faire basculer sa vie du rêve au cauchemar, surtout dans un monde aussi difficile que celui du cinéma hongkongais.

Baptiste Pagani, à travers le personnages de Jin Ha, nous montre une facette du cinéma hongkongais, celui que l’on appelle « moderne », c’est-à-dire celui qui succéda à « la nouvelle vague » en 1986 et qui s’acheva à la fin des années 1990, après la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine. La quantité primait souvent sur la qualité et les ambitions artistiques des réalisateurs étaient souvent limitées par les producteurs. Il fallait faire dans le spectaculaire, l’efficace et présenter au public un tableau immédiatement compréhensible et surtout divertissant. Nous retrouvons ce soucis de simplicité et d’efficacité dans la bande dessinée qui n’approfondit pas les relations entre les protagonistes, ni ne s’attarde sur la psychologie ou la vie de tous les jours de notre héroïne. Par exemple, le méchant est vraiment méchant mais on ne sait pas trop pourquoi. Cependant, cela permet de dramatiser le récit et d’expliquer la soumission de Jin Ha, soumission qui est peu compréhensible de nos jours surtout vu de nos yeux d’Occidentaux. The Golden Path fait par ailleurs penser au film Viva erotica de Derek Yee (1996) qui est à la fois une comédie, une métafiction, et même une parodie du cinéma hongkongais. Ce n’est pas le cas ici, mais le fonctionnement des studios de cinéma de Hong-Kong nous y est, ici aussi, présenté de façon sinon réaliste, tout au moins crédible et les références sont nombreuses pour celles et ceux qui sauront les voir.

Une bonne histoire ne suffit pas (même si c’est indispensable). Sa mise en forme, tant graphiquement que pour les dialogues, doit être au niveau. Dans le cas présent, il faut éventuellement faire abstraction d’un dessin influencé par les jeux vidéos japonais, par un graphisme non franco-belge mais plutôt manga et comics alternatifs, par l’univers visuel que l’on peut rencontrer dans le monde de l’animation (et pouvant rappelant l’École des Gobelins). Le tout donne un mélange auquel il faut s’habituer. Néanmoins, les amatrices et amateurs des œuvres de Guillaume Singelin (lui aussi au Label 619) devraient y arriver sans difficulté. La narration est fluide, efficace, sans temps mort, rythmé par un chapitrage réussi. Chaque nouvelle partie est introduite par une fausse (et très jolie) affiche d’un film auquel a participé Jin Ha. N’oublions pas les savoureuses fiches explicatives sur la façon de faire un bon film. Elles apportent une touche d’humour dans un récit qui en manque parfois. Il en résulte une excellente lecture qui donne envie de découvrir le reste de la bibliographie de Baptiste Pagani. Voilà qui prouve la qualité de cette bande dessinée malheureusement passée sous les radars et donc restée trop méconnue.

Tortax, le Super-Chélonien oublié

Présentation par l’auteur : « Dans le village de Primevert-Sur-Roseaux vit une Tortue au tempérament plutôt paisible qui ne la différencie pas de ses consœurs. Ceci en apparence car cette Tortue aux allures naïves cache son identité de super héros. A l’approche de menaces et lorsque son village se trouve en danger cette Tortue change de carapace pour entrer dans celle de Tortax. Une super carapace remplie et bourrée de gadgets qui la rend invulnérable et qu’elle actionne selon les circonstances. Des pouvoirs technologiques qui la permet de voler et se déplacer à des vitesses extraordinaires. Indestructible grâce à sa carapace qui la protège de tout les dangers qui l’entoure. Son principal ennemi est Zanzyme 1er, Roi d’une armée de Corbeaux qui sème la terreur dans la forêt et particulièrement sur le village de Primevert-Sur-Roseaux. Après ses missions et lorsqu’elle a quittée sa super carapace Tortax redevient une tortue aussi vulnérable qu’une tortue ordinaire mais aussi maligne comme dans une célèbre fable de La fontaine. » 1

En matière de bandes dessinées, nous avons toutes et tous nos « madeleines de Proust », même si celles-ci ne sont pas toujours de bon goût. J’ai réalisé il y a peu que Tortax – Le trésor du marais vert en faisait partie. Presque un demi-siècle après sa sortie, la BD a bien supporté sa relecture, me ramenant à l’époque bénie de l’enfance. Toute simple qu’elle est, cette œuvre qui s’adresse à un jeune public a des qualités indéniables, au point de toujours pouvoir plaire à un lectorat actuel à ma grande surprise (constatation faite sur un échantillon non représentatif et familial). Si à l’époque, je n’accordais que peu d’intérêt aux auteurs et aux circonstances éditoriales de mes lectures, il n’en est plus de même maintenant : d’après les informations trouvées sur le site Internet d’un des deux auteurs, la série a été prépubliée pendant deux ans (quatre d’après un entretien lu autre part) dans le mensuel jeunesse Record (Bayard Presse) et s’est arrêtée en même temps que son support. Néanmoins, évitant à la super tortue de tomber (totalement) dans l’oubli, les éditions Dargaud ont décidé en 1974 de sortir en album cinq histoires (de six à huit planches sauf la cinquième qui en compte seize). Il n’y a pas eu de deuxième tome et il faudrait faire quelques recherches au département des périodiques de la BnF pour savoir ce qu’il resterait à éditer (car à lire différents entretiens trouvables sur le net, DuBouillon ne semble pas avoir une mémoire fiable à ce sujet). En effet, les informations disponibles sur son site sont contradictoires et ne correspondent pas à d’autres dates glanées ici ou là, comme sur le site lambiek.net qui consacre une fiche au bédéaste. Autre exemple : Il semblerait, d’après le site BD oubliées, qu’une nouvelle aventure en 6 pages de Tortax soit parue dans le magazine Hop! de juin 1977. Si un éditeur de vieilleries (pardon, spécialisé dans le patrimoine du neuvième art) avait dans l’idée de proposer une intégrale, cela lui demanderait un sacré travail de recherche, à moins que DuBouillon ait gardé tous ses originaux…

Trouver de nos jours des informations sur des auteurs de presse jeunesse utilisant des pseudonymes peu originaux et ayant exercé trente ou cinquante ans plus tôt n’est pas simple, surtout si les périodiques où ils ont officié ne sont pas encore indexés par des sites comme le fameux bdoubliees.com. Cependant, en cherchant bien, on finit par trouver deux ou trois choses : DuBouillon (de son vrai nom Alain Bouillon) a commencé sa carrière comme illustrateur à Paris Match en 1965, à l’âge de 22 ans. Il y publie des courts gags, les Gribouillons qu’il reprend des années plus tard dans la version française du journal Tintin (Le Lombard). Il en est un collaborateur régulier dans les années 1960-1970, ainsi que dans le magazine Record où il propose sur des scénarios de Reiser les courts gags Gazoual. Ses dessins d’actualité et ses caricatures, son activité dans la presse sont même proposées dans le magazine allemand Stern pendant plusieurs années. Il est d’ailleurs étonnant de voir que Tortax a été traduit en brésilien et en turc. Une grande partie de sa carrière, toujours en cours, se déroule dans les pages du Progrès Dimanche et ses meilleurs dessins sont regroupés en album tous les ans : Les semaines de DuBouillon. Les amateurs de planches originales ont même la possibilité d’en acquérir auprès d’un galeriste à des prix tout à fait abordables, DuBouillon ayant eu les honneurs d’une expo-vente fin 2023. Auguste n’a pas laissé une trace aussi importante dans le monde de la bédéphilie. De son vrai nom Jean-Paul Auguste Lesoeur, né en 1940, mort en 2003, Auguste est principalement connu pour sa série de gags en une demi-page, les Cromagnonneries, publiées dans Tintin durant la deuxième moitié des années 1960. D’après le site lambiek.net, il s’est ensuite consacré au dessin publicitaire avant de devenir libraire. Et c’est tout ! Résultat, nous n’avons pas réussir à éclaircir un dernier point : quel était le rôle précis des deux auteurs dans l’élaboration de Tortax ? 2

  1. Afin de respecter la prose de l’auteur, nous avons laissé les fautes, mais sans les relever ↩︎
  2. Je remercie Manuka pour sa relecture et ses précieuses informations complémentaires. ↩︎